« Trop d’information tue l’information. » Tout journaliste qui se respecte a médité cet adage. En matière d’immobilier, l’abondance d’information peut donner le vertige. Le novice qui s’aventure dans le domaine de la pierre rencontre sur sa route quantité d’organismes publics, nombre d’agents immobiliers ou de marchands de défiscalisation, quelques centres de recherche, sans oublier les gestionnaires de fonds ou d’immobilier en direct.
Cette profusion, déstabilisante au premier abord, se révèle salutaire, car l’impétrant finit par se rendre compte que « ça n’est pas si simple que ça ». Ces loyers sont-ils nets ou bruts ? Ce rendement prend-il en compte les frais occasionnés ? Parle-t-on de rendement global ou de rendement locatif ? Cet indice des prix est-il assis sur des transactions réalisées ? donc sur une part marginale du parc ? ou sur un patrimoine expertisé ? Mais alors, comment les experts valorisent-ils l’immobilier en l’absence de transactions ?… Ces questions méthodologiques se doublent d’une difficulté pratique : celle de comparer des données dont le périmètre et la fréquence de mise à jour diffèrent considérablement.
L’exemple le plus patent concerne les prix du logement. Comment un particulier pourrait-il convenablement piloter son investissement locatif, quand il dispose des chiffres de la FNAIM, de la Chambre des Notaires, de tel réseau de commercialisation ou de tel site internet de vente aux particuliers ? C’est le problème qu’a soulevé le CNIS (Conseil National de l’Information Statistique) dans un rapport publié début avril. Il dénonce un « trop-plein » de données : « Aucun aspect du secteur du logement ne semble rester dans l’ombre, écrivent les rapporteurs. La nature ayant horreur du vide, les indicateurs précoces ne manquent pas, ils abondent, même si souvent ils divergent ». Le Secrétaire d’Etat au Logement, Benoist Apparu, a donc réclamé un indice fiable, fréquemment réactualisé, délivrant les prix du logement « à l’échelle d’une rue ».
En supposant qu’un tel indice soit faisable, est-il souhaitable ? En cette matière comme dans d’autres, la concurrence entre producteurs doit bénéficier aux utilisateurs. La politique de l’indice unique, appuyé sur l’autorité de l’Etat, reviendrait à geler l’innovation, alors même que la conception d’indices est un champ où la recherche a encore des progrès considérables en chantier*. Plutôt que de chercher à tout prix « l’indice », ne serait-il pas plus efficace d’affiner l’interprétation des indices existants, en les remettant dans leur contexte, en les comparant, en rendant à chacun sa singularité et sa modestie ?
* Signalons à cet égard la dernière innovation en date : l’indice RPX IEIF Logements Paris Ile-de-France, calculé quotidiennement à partir des données des Notaires et publié depuis le 26 mai 2010 sur www.ieif-indices.com