Chaque année depuis 15 ans, Capgemini et Merrill Lynch Wealth Management proposent un rapport sur la richesse dans le monde. L’objectif est de voir dans quelles zones géographiques se crée la richesse, où elle se place et ce que les banques privées doivent faire pour capter et retenir la clientèle aisée.
Premier enseignement à tirer de l’étude portant sur l’année 2010 : le nombre des millionnaires en dollars et leur patrimoine dépassent les niveaux d’avant-crise. A la fin de l’an passé, les millionnaires en dollars étaient 10,9 millions dans le monde (contre 10 millions en 2009 au terme d’une première année de reprise de l’économie et des marchés, 8,6 millions en 2008 et 10,1 millions en 2007, précédent record) ; ensemble, ils détenaient 42.700 milliards de dollars, contre 39.000 milliards en 2009, 32.800 milliards en 2008 et 40.700 milliards en 2007.
La population mondiale des millionnaires reste fortement concentrée dans trois pays : les Etats-Unis, le Japon et l’Allemagne, mais l’écart de croissance entre les pays développés et les grands pays émergents fait bouger les lignes : pour la première fois en 2010, la région Asie-Pacifique dépasse l’Europe et se place au deuxième rang derrière l’Amérique du Nord, à la fois par le nombre de millionnaires et le montant total de leur patrimoine.
Quelques chiffres reflètent bien ces évolutions en cours. Globalement, en 2010, le nombre des millionnaires en dollars a progressé de 8,3 %, mais il a augmenté de 33,3 % à Hong Kong, de 33,1 % au Vietnam, de 28,7 % en Pologne (pays européen dont le dynamisme intéresse de plus en plus les gestionnaires de patrimoine), tandis qu’il ne progressait que de 1,4 % au Royaume-Uni et reculait de 4,7 % en Italie.
La France se maintient au sixième rang, derrière les Etats-Unis (3,1 millions de millionnaires), le Japon (1,7 million), l’Allemagne (924.000), la Chine (535.000) et le Royaume-Uni (454.000) ; mais le nombre de ses millionnaires en dollars, 396.200, n’a progressé l’an passé que de 3,4 %, soit nettement moins vite que la moyenne mondiale.
L’Europe exactement dans la moyenne mondiale pour l’immobilier
Ces statistiques concernent les particuliers disposant d’un patrimoine financier de plus d’un million de dollars, hors résidence principale, biens consommables ou durables et collections. La répartition de ce patrimoine fluctue chaque année en fonction de deux éléments : les flux d’investissement au cours de l’année écoulée et l’évolution du prix des actifs. Par exemple, une hausse de la part consacrée aux actions peut simplement refléter le fait que les marchés d’actions ont progressé au cours de l’année écoulée sans que l’investissement en actions n’ait progressé.
En 2010, les particuliers semblent avoir privilégié les actions au détriment des placements monétaires, peu rémunérés, et des obligations. De fait, ils ont fait un bon choix, même si la hausse des marchés boursiers mondiaux a été plus modes te qu’en 2009, année de reprise, et si dans certains pays comme la France les actions ont au total réalisé un parcours plutôt décevant.
Et l’immobilier ? Sa part dans le total des patrimoines s’établit à 19 %, contre 18 % à la fin de 2009, mais cette évolution globale cache de profondes disparités selon les zones géographiques et les segments considérés du secteur immobilier.
Très clairement, c’est en Asie – Pacifique hors Japon que l’investissement immobilier occupe la part la plus importante (31 % du total des actifs financiers), contre 23 % au Japon ou 13 % en Amérique du Nord. L’Europe se situe précisément dans la moyenne mondiale à 19 % (contre 33 % pour les actions, 29 % pour l’obligataire, 13 % pour le monétaire et 7 % pour les investissements alternatifs tels que les produits structurés, les hedge funds, etc.).
Globalement, l’investissement en immobilier résidentiel continue de représenter la part la plus importante, bien qu’en légère réduction (46 % du total consacré à l’immobilier contre 48 % en 2009). C’est en Asie Pacifique encore que l’on y consacre les montants les plus importants, la classe moyenne montante étant très demandeuse de logements de haute qualité ; mais, même là, la tendance est plutôt au recul, à 51 % de l’ensemble des placements immobiliers contre 60 % en 2009.
L’immobilier d’entreprise est en recul modeste, à 26 % du total mondial des investissements immobiliers contre 27 % en 2009. Il est davantage perçu comme porteur dans les pays émergents que dans les pays développés. Mais, en ce domaine, les Etats-Unis semblent avoir fortement contribué à noircir le tableau avec des taux de vacance historiquement élevés de 10,9 % dans les murs de commerce et 17,6 % dans les bureaux. En Europe, la part consacrée à l’immobilier d’entreprise en direct atteint 30 %, mais les auteurs de l’étude estiment que c’est parce que certains investisseurs n’ont pas réussi à céder leurs actifs en raison du manque de liquidité du marché.
Quant à l’investissement immobilier par l’intermédiaire des REIT (Real Estate Investment Trusts), qui nous intéresse particulièrement, il a progressé à l’échelle mondiale, de 12 % du total de l’immobilier à 15 %. Cette progression s’explique surtout par les chiffres enregistrés aux Etats-Unis et au Japon (respectivement 24 % et 23 % du total), où cette forme d’investissement est plus développée qu’en Europe.
Pour l’année en cours et 2012, ce rapport mise sur un déclin relatif de l’immobilier dans les portefeuilles de placements, à 15 % fin 2102 contre 19 % en 2010, malgré un appétit toujours élevé pour ces produits dans les pays émergents. Cela dit, tous les pays et tous les segments ne sont pas concernés de la même façon et, surtout, en ce qui concerne la pierre-papier, les chiffres avancés dans cette étude montrent clairement que l’Europe, dont la France, a encore du chemin à parcourir.
Les chiffres de collecte des SCPI depuis un an et demi et la tenue des foncière cotées en comparaison avec l’ensemble des autres valeurs cotées en Bourse montrent clairement que les épargnants français, aujourd’hui, considèrent avec un surcroît d’intérêt les placements financiers ayant un support immobilier. Et cela ne concerne pas que les millionnaires. Nous aurons l’occasion d’en reparler.
G. H.
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