Jean-Jacques Olivié, président d’Euryale, est face à Guy Marty sur un sujet sensible : le rendement des SCPI. Cet indicateur -de court terme- a-t-il pris trop d’importance aux yeux des investisseurs ? Ces derniers ont-ils oublié que l’immobilier est « vivant », et que sa performance de long terme dépend aussi des investissements qu’il convient de réaliser pour préserver ou accroître sa valeur ? Débat.
Jean-Jacques Olivié, ce qui m’intéresse beaucoup dans notre entretien d’aujourd’hui, c’est ton expérience dans l’immobilier. Pierval Santé n’est certes née qu’en 2014. Mais tu avais auparavant lancé des SCPI logement. Et auparavant encore, travaillé dans l’immobilier résidentiel, en tant que promoteur, administrateur de biens…
Jean-Jacques Olivié – Effectivement, j’ai été promoteur et administrateur de biens dans une vie antérieure. J’ai géré jusqu’à 22 000 logements, soit l’équivalent de 2,5 Md€ d’actifs sous gestion
En as-tu tiré des enseignements sur le sujet du rendement ?
J-J Olivié – Ce qui m’a marqué, lors du passage de cette activité gestion logement, avec des propriétaires en direct, vers le monde des SCPI -donc de l’immobilier financier-, c’est cette obsession du rendement. L’obsession du revenu, je la comprends. L’obsession du rendement, un petit peu moins. Dans le logement, j’avais en face de moi des propriétaires. Ce qui leur importait, essentiellement, c’était la valeur de leur bien. Ils savaient que, chaque année, il pouvait y avoir un locataire qui ne payait pas. Des carences locatives. Ou des travaux de rénovation à réaliser. Ils savaient que l’immobilier est un produit vivant. Donc, dans lequel il faut investir régulièrement. Or, lorsque tu es obsédé par le rendement, tu « bloques » un peu lorsqu’il s’agit d’investir, d’engager des CAPEX[1], comme l’on dit dans nos métiers. Donc, oui, j’ai bien senti la différence entre ces deux approches de l’immobilier sur le sujet du rendement.
Cela peut s’expliquer compte tenu de la concurrence, en termes de rendement, entre les différents produits financiers. Or, comment savoir si une société de gestion a bien travaillé, par rapport à ses concurrents ? C’est bien le rendement qui, en quelque sorte, extériorise le travail accompli…
Je suis bien d’accord qu’il ne faut pas aller trop loin sur le sujet du rendement. Par exemple, aujourd’hui, la forte concurrence sur les rendements des SCPI ressemble à des campagnes électorales permanentes. C’est malsain…
J.-J. Olivié – C’est du court-termisme. Ce qui m’interpelle, c’est que l’on attend de la SCPI qu’elle soit une sorte de « coucou suisse ». Où, tous les trimestres, le rendement doive sortir de la même façon. Mais cette attente est-elle compatible avec un immobilier vivant ? Avec un portefeuille qui, selon les années, va grossir puis va vieillir. Plus il va grossir, d’ailleurs, plus il va vieillir. Or, quels sont les dangers de l’immobilier aujourd’hui ? C’est l’obsolescence énergétique. C’est l’obsolescence d’usage. Est-ce qu’il vaut mieux réguler ton rendement, au profit de ta valeur capitalistique ? Ou, à l’inverse, privilégier le rendement à court terme sans se préoccuper de l’avenir…
Certes, le marché est secoué par cette histoire de changement d’usage. Mais aussi par la déferlante technologique. Mais aussi par le contexte des taux, etc. Toutefois, dans ce nouveau contexte, certains acteurs ont la possibilité d’intervenir sur des actifs qui ne sont donc peut-être pas au même prix qu’avant. Et donc offrent des rendements élevés pour les épargnants…
J.-J. Olivié – – Là, tu parles d’opportunités…
Bien sûr.
J.-J. Olivié – Mais, alors, il ne faut pas dire à l’investisseur qu’il doit rester au minimum 10 ans investi dans un véhicule. Or, c’est précisément ce que nous demande de faire l’AMF. De prévenir les investisseurs qu’il s’agit d’un placement long terme. Pas de dire qu’ils vont profiter de 10 ans d’opportunités.
Je n’ai pas dit exactement cela…
J.-J. Olivié – Que l’on dise, aujourd’hui il y a des opportunités à saisir, et que ces opportunités ont un effet relutif, c’est très bien. C’est logique. C’est normal. Mais si l’on parle de l’immobilier dans la durée, je le redis, l’immobilier est un produit vivant. Si tu veux maintenir sa valeur, tu es obligé de faire des investissements. Et si tu fais des investissements, il faut accepter, à un moment donné, un décalage de rendement. La performance, à un moment donné, peut baisser, à cause des investissements. Puis se reprendre, ensuite.
Il y a tout de même quelque chose de très particulier. Prenons l’exemple des bureaux. Il y avait ce que l’on appelait le « prime ». Des bureaux sur les Champs-Elysées, par exemple. Le « prime », c’était considéré comme le meilleur, en termes d’immeuble, en termes de localisation. Et qui pouvait être acheté partout dans le monde.
J.-J. Olivié – « Prime » rimait avec invulnérabilité…
A très long terme, oui. Et, donc, pour le « prime », on était prêts à accepter un rendement moindre que celui servi par d’autres bureaux, pourtant eux aussi bien localisés et utilisés. Y a-t-il encore aujourd’hui cette notion de « prime » dans l’immobilier financier aujourd’hui ?
J.-J. Olivié – Question intéressante. Ce que l’on constate, avec la crise que nous traversons, et dont nous sommes tout doucement en train de sortir, c’est qu’effectivement les actifs immobiliers qui ont le plus décoté sont précisément ceux qui étaient qualifiés de « prime » hier…
Un changement de définition, on est bien d’accord…
J.-J. Olivié – Ce qui est paradoxal. Sauf que, parallèlement, on a aussi assisté à l’émergence d’une nouvelle catégorie d’immobilier, l’immobilier géré. Le secteur de la santé en est un bon exemple, mais pas que. Le principe est que, grâce à la signature de baux longs, contractés avec des exploitants que tu connais, et qui vont investir dans leur locaux d’exploitation, tu assures une certaine stabilité à tes revenus. Ce qui réduit donc le risque, dans le temps, d’une fluctuation de ces revenus. Ce qui conduit à se poser la question : n’y a-t-il pas, au-delà de l’emplacement, d’autres critères dans l’immobilier susceptibles d’apporter de la sécurité à ce placement. Autrement dit, n’est-il pas possible de qualifier l’immobilier de « prime » sur la base d’autres critères que celui de l’emplacement…
Si je comprends bien, cela voudrait dire que certaines SCPI -notamment celles qui investissent dans de l’immobilier géré- pourraient produire un rendement moins élevé. Mais offrir, en contrepartie, une meilleure visibilité sur la valeur de leurs actifs à long terme. Est-ce bien cela que tu veux dire ?
J.-J. Olivié – Ce que l’on constate, aujourd’hui, c’est une évolution dans les motivations des investisseurs. Qui abordent leurs investissements en immobilier sous forme d’allocation. Ils ne choisissent pas, par exemple, une SCPI dédiée au secteur de la santé, parce que ce secteur leur plaît. Non, ils raisonnent allocation. Ils veulent, dans leur allocation, un produit solide, qui va leur apporter de la résilience. Ils vont donc regarder les actifs -et les SCPI- les plus résilients: santé, par exemple, mais aussi hôtellerie. Mais, parallèlement, sélectionner des produits qui vont leur offrir plus de rendement. Et donc, peut-être, aller chercher une SCPI qui est plus le crédo de l’opportunité. Et cela, c’est assez nouveau…
Donc, peu importe qu’une SCPI en particulier donne peu, ou beaucoup, de rendement. Ce qui est important, c’est de mettre en place une allocation entre différentes SCPI pour, précisément, accéder à différents types d’actifs ou de secteurs, assortis de plus ou moins de rendement…
J.-J. Olivié – Et l’on en revient à notre conversation de départ. Je pense effectivement que l’on ne peut pas regarder l’ensemble des SCPI avec un seul objectif. Qui serait seulement celui du rendement. Car, en soi, cela ne veut rien dire.
Donc, je comprends que tu n’es pas hostile au concept de rendement. Mais bien à son utilisation trop générale, et sans distinction.
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A propos d’Euryale(i)
Premier acteur à s’être positionné sur l’immobilier de santé, Euryale est le 7e investisseur mondial sur le secteur de la santé avec une capitalisation de 3,29 Md€. Ses 260 actifs ciblent essentiellement le secteur de la santé (établissements d’hébergement pour personnes âgées et handicapées, cliniques, maisons médicales, laboratoires, actifs liés à la recherche, au « Life Sciences» …) et sont répartis à travers neufs pays (France, Royaume Uni, Allemagne, Italie, péninsule ibérique, Canada…). Euryale gère la SCPI Pierval Santé[2], labellisée ISR en 2023, et la SC Trajectoire Santé. A travers ses deux véhicules -les premiers à être des fonds de partage, au bénéfice de l’Institut du Cerveau- la société privilégie une approche patrimoniale à la fois créatrice de valeur et à impact sociétal positif, tout en intégrant les enjeux ESG dans l’ensemble de ses processus d’investissement et de gestion.
(i) Information extraite d’un document officiel de la société
[1] « Dépenses d’investissement de capital », en français, les CAPEX regroupent toutes les dépenses effectuées par une société se rattachant à ses investissements matériels;
[2] Investir en SCPI comporte un risque de perte en capital. Il s’agit d’un investissement de long terme pour lequel la liquidité peut être limitée et dont le capital et les revenus ne sont pas garantis. La SCPI est soumise à d’autres risques tels que notamment le risque de change, de durabilité et le risque lié à une gestion discrétionnaire. Ceci est une communication publicitaire. Pour prendre connaissance des risques veuillez consulter le DIC et la note d’information de la SCPI disponibles sur le site Internet d’Euryale : https://www.euryale-am.fr/nossolutions/pierval-sante/, avant de prendre toute décision d’investissement;