L’IEIF vient de publier une étude consacrée au secteur des locaux d’activité[1]. L’Institut fait aussi le point sur l’ensemble du segment logistique dans son dernier tableau de bord[2]. Etat des lieux et perspectives, avec Charles-Henri de Marignan et Soazig Dumont, analystes seniors à l’IEIF.
L’attentisme semble être le mot d’ordre des investisseurs institutionnels depuis le 3e trimestre 2022. Touche-t-il aussi le secteur de la logistique et des locaux d’activité ?
Soazig Dumont – Les investisseurs anticipent effectivement le repricing des actifs, une nouvelle remontée des taux… et une récession économique. Ceci explique cet attentisme, qui touche tous les secteurs immobiliers. Le marché des locaux d’activité en est d’ailleurs la parfaite illustration. On le constate d’abord côté utilisateurs. Le début d’année était très dynamique. Mais l’activité a ralenti depuis le deuxième trimestre. Et le recul des prises à bail s’est poursuivi au troisième trimestre, avec seulement 795 000 m² placés. On retrouve cette même tendance côté investissements. Fin septembre, sur les neuf premiers mois de l’année, plus de 5 Md€ ont été investis dans la classe d’actifs logistiques en France. Mais seulement 1,9 Md€ sur le seul 3e trimestre.
Le secteur bénéficie toutefois de fondamentaux solides…
Charles-Henri de Marignan – Pour les investisseurs, cette classe d’actifs conjugue effectivement plusieurs facteurs positifs. Elle bénéficie notamment de l’essor du e-commerce. Une étude réalisée par Knight Frank[3] estime que les ventes en ligne devraient progresser de 48 % dans les principaux marchés européens d’ici 2026. Ce qui nécessiterait le développement de 3,5 millions de mètres carrés de locaux complémentaires, destinés à la livraison du dernier kilomètre. La demande pour les surfaces logistiques est donc très forte. Elle s’explique aussi par la nécessité de réorganiser les chaînes d’approvisionnement. Notamment en renforçant leur robustesse, par la création de surfaces « tampon » supplémentaires. Le secteur devrait aussi bénéficier du processus de relocalisation de certaines activités productives. Mais si les investisseurs s’intéressent aux actifs logistiques et aux locaux d’activité, c’est aussi bien sûr parce qu’il s’agit d’actifs de diversification aux performances robustes…
Précisément, où en est-on aujourd’hui, en termes de rendement, sur le secteur logistique ?
Charles-Henri de Marignan – Je rappelle qu’historiquement les locaux d’activité affichent des taux de rendement stables et supérieurs à ceux des autres classes d’actifs. Y compris à celle du secteur logistique. Cette dernière surperforme en revanche tous les autres secteurs immobiliers en termes de rendement en capital.
Soazig Dumont – Aujourd’hui, les rendements locatifs de ces deux secteurs ont eux aussi enclenché leur décompression. Le taux de rendement prime s’établit, selon CBRE, à 3,70% pour les actifs logistiques. Et à 4,50% pour les locaux d’activité.
Quels types d’investisseurs restent les plus présents sur la logistique et les locaux d’activité ?
Charles-Henri de Marignan – Sur le créneau des locaux d’activité, en France, le marché est animé par les grands fonds d’investissement (61% des acquisitions en 2021) et fonds de pension étrangers, notamment anglo-saxons. Sur l’ensemble des secteurs logistiques/activités, on estime que le marché pourrait toutefois se recentrer prochainement sur les pure players. Et les investisseurs de long terme. Car ils sont les plus à même, dans ce contexte de remontée progressive des taux de rendement, d’absorber le repricing des actifs…
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A propos de l’IEIF(i)
Créé en 1986, l’IEIF est un centre d’études, de recherche et de prospective indépendant spécialisé en immobilier. Son objectif est de soutenir les acteurs de l’immobilier et de l’investissement dans leur activité et leur réflexion stratégique, en leur proposant des études, notes d’analyses, synthèses et clubs de réflexion.
L’approche de l’IEIF intègre l’immobilier à la fois dans l’économie et dans l’allocation d’actifs. Elle est transversale, l’IEIF suivant à la fois les marchés (immobilier d’entreprise, logement), les fonds immobiliers (cotés : SIIC, REIT ; non cotés : SCPI, OPCI, FIA) et le financement.
(i) Information extraite d’un document officiel de la société
[1] « Locaux d’activités en Europe : une classe d’actifs attractive et qui se transforme » – Novembre 2022 – IEIF – Charles-Henri de Marignan
[2] « Le tableau de bord trimestriel de l’immobilier en France » – 3e trimestre 2022 – IEIF – Soazig Dumont
[3] Knight Frank – Europe’s Last Mile – Europe Logistics Report 2022