Chloé Saxod, chargée du développement de la foncière « Les 3 colonnes », détaille l’objectif et les modalités d’intervention de cet acteur du viager solidaire. Qui entame sa collecte 2024… Interview.
« Les 3 colonnes », c’est quoi ? Une association ? Une foncière solidaire ?
Chloé Saxod – C’est une coopérative. Qui a pour mission de se porter acquéreur de logements occupés par des personnes âgées. Celles qui le souhaitent, et celles qui sont dans le besoin. Afin d’éviter que ces personnes ne soient contraintes de quitter leur logement pour un établissement spécialisé. L’objectif, c’est vraiment de leur donner les moyens financiers leur permettant de rester chez elles jusqu’à la fin de leurs jours.
Donc, vous achetez leur logement, et vous leur prodiguez des services à domicile, c’est cela ?
Chloé Saxod – Exactement. En fait, l’objectif n’est pas uniquement de leur donner des moyens financiers. Mais également de les accompagner, de « coordonner » leur bien-vieillir à domicile.
Combien de personnes ont bénéficié de votre dispositif à ce jour ?
Chloé Saxod – Nous accompagnons aujourd’hui 550 bénéficiaires, à travers tout le territoire.
Qui a eu cette bonne idée ?
Chloé Saxod – Sébastien Tchernia, en 2013. Cette idée est née d’une histoire personnelle. Sa grand-mère était atteinte d’une maladie. Et s’est trouvée contrainte de quitter son logement. Sébastien, cofondateur donc de la SCIC[1] « Les 3 colonnes », s’est alors mis en tête de trouver une solution pour que les personnes âgées puissent rester chez elles, tout en bénéficiant d’un accompagnement.
Et vous ? Qu’est-ce qui vous a séduite dans ce projet ?
Chloé Saxod – Eh bien, lorsque j’ai rejoint Les 3 Colonnes, je travaillais en contact direct avec les bénéficiaires. Je les rencontrais. Et je leur permettais d’accéder à nos services.
Donc, c’est le contact avec les personnes âgées qui vous a séduite…
Chloé Saxod – Exactement. Car on a vraiment l’impression de leur apporter quelque chose…
Parlons d’argent, maintenant. Comment vos actions sont-elles financées ?
Chloé Saxod – Par le biais de l’appel public à l’épargne. Il y a des particuliers qui nous font confiance. Des institutionnels également. Comme la Caisse des dépôts et consignations, qui nous a rejoint en 2018 en entrant au capital de la structure. Elle dispose d’ailleurs actuellement de deux sièges au conseil d’administration.
Mais sous quelles formes peut-on investir ?
Chloé Saxod – Le premier outil, ce sont les parts sociales. Cette option permet de bénéficier d’une réduction d’impôt équivalente à 25% du montant investi. Il n’y a ni droit d’entrée, ni droit de sortie, ni de frais de gestion. L’argent est exclusivement utilisé pour financer le maintien à domicile des personnes âgées. Exemple : vous investissez 20 000 €. Vous bénéficiez d’une réduction d’impôt de 25% de ce montant. Et vous récupérez vos 20 000 € au terme de 7 ans.
Sept ans de détention, donc. La seconde option ?
Chloé Saxod – Elle peut se comparer à un placement obligataire. Cette formule est en effet assortie d’une rémunération fixe et d’une rémunération variable, versées sous la forme d’un coupon annuel. Au terme de 7 ans -là encore-, les titres sont remboursés. Cette période de 7 ans est recommandée -mais pas obligatoire-, car elle permet de bénéficier d’une prime de remboursement. Qui n’est versée qu’à la condition de conserver les titres durant 7 ans.
Quel rendement final, pour l’investisseur ?
Chloé Saxod – Le TRI cible est de 5% par an, pendant 7 ans.
Mais, si je comprends bien, tout le modèle repose sur la revente des logements ?
Chloé Saxod – Il repose, en réalité, sur le développement de la foncière. C’est en effet au moment des interventions de la foncière que cette dernière est rémunérée, à hauteur de 5%. La revente des logements sert uniquement à assurer le remboursement de nos financeurs.
Ce que vous nous décrivez, en fait, c’est du vrai viager solidaire. Etes-vous en concurrence avec certains fonds immobiliers qui, disons, se sont emparés de cet argument marketing pour se lancer sur le marché du viager ? D’abord, ces fonds achètent-ils les mêmes types de logements que vous ?
Chloé Saxod – Alors non, pas du tout. Enfin, comme vous le rappelez à juste titre, ce sujet « marketing » pour certains est, pour nous, un sujet bien « concret ». On écoute vraiment les personnes âgées. On va même plus loin. Notre crédo, c’est un viager sans spéculation, dont l’objectif est d’accompagner et de sécuriser le cadre de vie des personnes économiquement fragiles.
Votre action est donc parfaitement louable. Mais vous avez dit qu’elle bénéficiait à 550 personnes. Ce qui doit représenter à peine 0,001% des besoins en matière de maintien à domicile. Pouvez-vous « grossir » pour davantage couvrir ces besoins ?
Chloé Saxod – Je vous confirme que ce chiffre est très faible en comparaison des besoins. On recense aujourd’hui environ 15 millions de personnes âgées. D’ici 2030, elles représenteront près du quart de la population. Les besoins iront donc croissants. On le sentait déjà très clairement en 2013, lors de la création de « Les 3 Colonnes ». La pression est encore plus forte aujourd’hui. Nous recevons ainsi plus de 200 demandes par mois, en provenance de personnes en difficultés. Ces demandes vont évidemment croître encore au cours des prochaines années. Raison pour laquelle nous avons décidé de doubler notre capacité d’intervention dès cette année.
Combien avez-vous collecté en 2023. Et quel objectif pour 2024 ?
Chloé Saxod – Nous avons collecté 30 M€ d’euros l’an dernier. Notre objectif est de doubler ce montant, donc de collecter 60 M€ cette année. Pour doubler notre capacité d’intervention sur tout le territoire.
Appel aux participations, donc…
A propos de « Les 3 Colonnes »(i)
Les 3 Colonnes, société coopérative d’intérêt collectif agréée entreprise solidaire d’utilité sociale, finance le maintien à domicile des personnes âgées grâce au Viager Solidaire.
(i) Information extraite d’un document officiel de la société.
[1] Société coopérative d’intérêt collectif.