Le PER est-il soumis à l’IFI ? Ceux qui sont imposables à l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) et qui détiennent un Plan d’Epargne Retraite (PER) investi en tout ou partie dans des supports immobiliers doivent-ils déclarer ces avoirs à cet impôt ? Le ministère de l’économie et des finances, dans une réponse à un sénateur, tranche cette question fiscale d’une façon curieuse. Un impôt sur la fortune pour l’épargne-retraite ? L’étonnante décision de Bercy…
Les épargnants peuvent souscrire les contrats d’épargne-retraite depuis le 1er octobre 2019. Rappelons que :
- Constitué sous forme d’un compte-titres. Le PER dit bancaire peut être investi dans des parts ou actions de sociétés immobilières.
- Constitué sous forme d’une assurance vie. Le PER dit assurantiel peut être investi dans des unités de compte immobilières.
Durant la phase d’épargne, le PER est par nature « non rachetable ». C’est-à-dire sans sortie possible, à l’exception de six hypothèses énoncées à l’article L. 224-4 du code monétaire et financier. Ces hypothèses concernent des accidents de la vie et l’acquisition de la résidence principale du souscripteur. Dès lors, le souscripteur de ce contrat d’épargne-retraite qui fait le choix de placer son argent en parts de SCPI, OPCI ou SCI d’unité de compte doit-il déclarer ces parts dans son patrimoine taxable à l’IFI ?
Voici la réponse du ministère de l’économie et des finances, sous réserve de l’appréciation des tribunaux. « La prise en compte de ces actifs dans l’assiette de l’IFI durant la phase de constitution de l’épargne dépend de la forme du PER » (1).
Le PER assurance vie est-il « rachetable » ou non ?
L’administration appréciera son caractère rachetable ou non conformément à l’article 972 du code général des impôts. Lequel prévoit l’imposition des contrats rachetables à hauteur de la fraction de leur valeur de rachat représentative des unités de comptes constituées d’actifs immobiliers imposables. Or le PER ne devient rachetable qu’à compter de la date de liquidation de la pension par son titulaire. Ou de l’âge d’ouverture du droit à prendre sa retraite, actuellement fixé à 62 ans (article L. 224-1 du code monétaire et financier).
Jusqu’à cette date de sortie – possible en capital ou en rente – les valeurs immobilières n’entrent pas dans l’IFI. Elles deviennent déclarables pour qui, relevant de l’IFI, voudrait prolonger son activité au-delà de l’âge légal de départ en retraite. Rappelons que l’on relève de l’IFI à partir de 1,3 M€ de patrimoine immobilier net.
Curieuse sanction pour l’épargne retraite
Par ailleurs, avant cette échéance de la retraite, il existe six cas de sortie anticipée du PER. Par exemple survenance d’une invalidité importante, cessation d’activité après liquidation judiciaire de son entreprise, acquisition de la résidence principale…. On parle alors de PER « réputé rachetable », ce qui, selon le ministère des Finances, rend les valeurs immobilières imposables. Et cela, même si le souscripteur du PER ne demande pas effectivement le rachat ! « L’attention est attirée sur le fait que la simple existence de l’événement permettant le déblocage suffit à donner au contrat un caractère rachetable » souligne la réponse ministérielle.
Ainsi :
- si vous achetez une résidence principale
- ou si vous perdez votre conjoint
- ou encore si vous devenez invalide à la suite d’un accident…
les unités de compte immobilières du PER assurance vie deviendront imposables à l’IFI. Cela même si vous ne faites pas de demande de déblocage.
Par exemple, vous achetez votre résidence principale sans avoir besoin de toucher à votre épargne retraite. Dans ce cas – curieuse sanction ! – cette épargne destinée à la retraite devient ipso facto, selon Bercy, rachetable. Et donc – pour ceux qui relèvent de l’IFI – imposable à raison des unités de compte immobilières. Cela à compter du 1er janvier de l’année suivante et pour toutes les années suivantes.
Le PER bancaire toujours soumis à l’IFI
a position de l’administration est différente puisque, estime le ministère, « la question du caractère rachetable ou non n’intervient pas ». On doit déclarer ces PER à l’IFI à hauteur des avoirs immobiliers éligibles, par exemple des SCPI (mais pas des actions de sociétés foncières cotées ou des parts de fonds investis en de telles actions).
À notre avis
La justice pourrait ne pas approuve cette logique très budgétaire au détriment de l’esprit de la loi. La création du PER avait en effet pour objectif d’inciter à une épargne retraite longue pour permettre aux futurs retraités de faire face à l’inévitable érosion des pensions. En outre, on peut s’étonner que l’administration fiscale fasse cette différence de traitement selon la nature de l’épargne retraite. Pourquoi pas d’impôt pour les fonds en euros ou en unités de compte boursières y compris les foncières cotées, et pourquoi un impôt pour les SCPI, OPCI et SCI ?
(1) JO Sénat 09/02/2023, page 974, réponse à Claude Malhuret
Voir aussi
L’IFI et les placements SCPI, OPCI, SIIC et OPCVM immobiliers