Le directeur général délégué de Perial AM est l’invité de l’émission « Les acteurs de la pierre-papier ». Au programme : la vision et les ambitions en matière d’ESG et d’ISR du gestionnaire de la SCPI PFO2. Son analyse du secteur du bureau et de celui des résidences gérées. Et un avant-goût des performances des SCPI de Perial en 2021…
Perial AM est l’une des plus anciennes sociétés de gestion de SCPI. Elle gère aujourd’hui plus de 5 milliards d’euros d’actifs immobiliers, au travers de différents véhicules, nous y reviendrons… Elle fait surtout partie des gestionnaires les plus en pointe sur les thématiques ESG et ISR. Non seulement parce que vous avez annoncé récemment plusieurs initiatives en ce domaine. Mais aussi parce que l’une de vos SCPI, PFO2, a été la première – dès 2009 – à se positionner sur le créneau de l’investissement immobilier durable. C’est le premier sujet que je voulais aborder avec vous : la montée en puissance de l’investissement responsable dans l’immobilier. « Tout le monde en parle » comme vous l’écrivez dans l’un de vos communiqués… Mais est-ce que « tout le monde » met réellement en œuvre des pratiques ESG ?
Loïc Hervé – Je ne sais pas si tout le monde « pratique » réellement l’ESG. C’est en tout cas, très clairement, une obligation. Qui effectivement n’était pas en place en 2009 lorsque, comme vous venez de le rappeler, Perial a lancé la première SCPI qui appliquait, avec 10 ans d’avance, le décret tertiaire… Notre conviction, c’est que la vente de produits qui ne sont pas très en pointe sur les critères ESG va devenir compliquée. Voire quasi impossible… Chez Perial AM, nous avons une vraie stratégie dans ce domaine. Avec 60 critères d’analyse qui s’appliquent à l’ensemble de notre parc immobilier. Et nous permet, in fine, de faire labelliser nos fonds dans une logique de progrès permanent. Nous avons en effet mis en place des « contrats d’amélioration » pour chacun de nos actifs. Afin de les emmener, systématiquement, au-delà de la moyenne du marché.
Ressentez-vous le même « empressement » chez vos concurrents ? Il y a, certes, une obligation. Mais apparaît-elle dans les projets ou les acquisitions qu’ils financent ?
Loïc Hervé – Oui, nous le constatons de plus en plus. En termes d’investissement, ces critères ESG deviennent absolument essentiels. Ils sont désormais discriminants dans les grilles d’analyse. En ce qui nous concerne, nous nous autorisons à refuser une opération si elle n’est pas conforme à nos grilles ESG. Les initiatives de place, dans ces domaines, sont aussi de plus en plus marquées. On le voit notamment sur des restructurations et rénovations d’actifs emblématiques. Mais aussi dans la manière dont sont désormais conduites les relations avec les clients locataires.
Sans entrer dans le détail de toutes les certifications, je voudrais en revanche que l’on s’attarde sur le label ISR immobilier. Celui-ci a été lancé il y a à peine un an, en octobre 2020. Fin septembre, près d’une trentaine de véhicules avaient reçu ce label. Et de nouveaux se déclarent maintenant quasiment chaque semaine. Certains se demandent si l’obtention de ce label n’est pas un peu trop « automatique ». Et s’il ne faudrait pas introduire plus de granularité qualitative… Cette idée d’un label à « plusieurs vitesses », vous en pensez quoi ?
Loïc Hervé – Alors, tout d’abord, nous sommes très heureux de la création du label ISR. Nous y avons œuvré, en participant au groupe de travail qui a créé ce label. C’est une excellente initiative et un très bon marqueur pour l’ensemble du marché. Nous espérons que l’ensemble de l’industrie souhaitera faire labelliser l’ensemble de ses gammes. Alors, oui, il faudra à un moment aller vers plus de graduation dans la qualité et la conduite de la gestion des actifs ESG. Comme cela existe déjà sur d’autres labels, BREEAM, HQE, LEED, etc. Chez Perial, nous viserons évidemment le label ISR « platinum ». Quant à savoir si le label ISR est aujourd’hui donné « automatiquement », c’est très loin d’être le cas. Pour avoir participé, avec mes équipes, aux travaux ayant mené à nos premiers labels, je peux vous assurer que l’auditeur, Afnor, nous a particulièrement challengé sur ces sujets…
Le label ISR n’est donc pas si simple à obtenir, c’est bien noté… Mais autre point : sans remettre en cause le bien-fondé de la démarche ESG, certains assets managers commencent toutefois à alerter sur le coût de ces nouvelles obligations. Et leurs conséquences sur la rentabilité des actifs. Concrètement, cela signifie-t-il que l’immobilier coûtera plus cher. Et rapportera moins ?
Loïc Hervé – La réponse est non. Ni dans l’immédiat. Ni, moins encore, à plus long terme. Tout simplement parce que la démarche ESG crée de la valeur. Les actifs qui ne seront pas au top sur ces sujets seront déclassés, repricés. C’est une évidence. A court terme, je rappelle qu’il y a beaucoup de choses à faire avant d’envisager des CAPEX[1] lourds. D’abord, il est vrai que nous essayons, à l’acquisition, de privilégier des actifs qui soient conformes à nos grilles ESG. Il y a ensuite tout un travail à mener en property management. Avec les locataires, pour apporter des améliorations significatives. Cela ne coûte pas forcément grand-chose. Mais c’est très efficace. Dans un second temps, lorsqu’un immeuble se libère, c’est la rénovation des actifs qui s’impose. Il y a également des leviers à actionner avec les collectivités locales.
C’est-à-dire ?
Loïc Hervé – Pour valoriser, par exemple, des droits à construire. Lesquels nous permettront de travailler plus sereinement les business plans des actifs et optimiseront la création de valeur. Nous ne voyons donc pas la démarche ESG comme un coût. Mais comme une opportunité d’améliorer encore la performance de nos actifs immobiliers. En revanche, il faut effectivement être très sélectif. Et éviter les actifs trop obsolètes, pour lesquels il n’existe pas nécessairement de solutions d’optimisation. Il faut donc aussi savoir vendre. Chez Perial, c’est l’une des raisons pour lesquelles nous pratiquons assez intensivement la rotation des actifs de l’ensemble des fonds que nous gérons.
La classe d’actifs immobiliers toujours dominante aujourd’hui est celle des bureaux. Perial est très présente sur ce secteur. Les bureaux doivent non seulement, pour une partie d’entre eux, être rénovés et adaptés à la nouvelle donne ESG. Mais également transformés et flexibilisés pour correspondre aux nouvelles attentes issues de la montée en puissance du télétravail. Comment travaillez-vous cette classe d’actifs aujourd’hui ?
Loïc Hervé – Nous commençons par écouter ce que nous disent nos clients. Post-crise, les enquêtes que nous menons constatent que l’immense majorité d’entre eux sont passés au télétravail. Plus de 90%. Dont la majorité (60%) avec deux jours de télétravail par semaine. Il est clair que cela impacte la manière dont ils s’organisent en termes de locaux. Ils demandent effectivement plus de flexibilité. En termes d’aménagements. Mais aussi sur les contrats de location. Et en termes de dispersion géographique. Avec cette nouvelle temporalité du travail émerge la notion de tiers-lieu. Notamment pour les collaborateurs contraints au télétravail 2 à 3 jours par semaine. Pour eux, la pérennisation de l’activité à domicile est en effet difficile. Il faut donc être en mesure de leur proposer des locaux adaptés. Nous travaillons activement à la mutation de nos actifs, afin de répondre à ces nouvelles demandes.
Le marché, en réalité, est de plus en plus fragmenté…
Loïc Hervé – C’est le deuxième acte. On observe clairement la fragmentation d’un marché désormais « à deux vitesses ». D’un côté, une demande locative accrue et concentrée sur les « CBD[2] » et la Première Couronne, pour des biens parfaitement aux normes environnementales et parfaitement connectés aux transports en commun. Pour cette catégorie d’actifs, les loyers continuent à monter. Et les valeurs continuent à progresser. C’est beaucoup moins vrai pour l’autre pan du marché. Là, il faut trouver des solutions. Avec les collectivités locales par exemple, comme je l’évoquais précédemment, pour envisager des transformations. Ce qui peut conduire à des opportunités de revalorisation. On ne peut en tout cas pas laisser ces actifs en l’état…
Vous avez devancé ma question sur les hausses de loyers, parfait. Evoquons maintenant d’autres classes d’actifs, qui sont en train de monter en puissance. Celles que l’on désignait auparavant comme « alternatives ». Je pense bien sûr aux secteurs de l’immobilier de santé, logistique, résidentiel, résidences gérées, etc. Perial s’est d’ailleurs en partie positionnée sur ces créneaux avec le lancement de PF Hospitalité Europe. Que dire de cette montée en puissance : effet de mode, ou tendance de long terme ?
Loïc Hervé – Il s’agit clairement, selon nous, d’une tendance de fond. Non seulement nous avons créé un véhicule qui y est dédié : PF Hospitalité Europe, qui fonctionne d’ailleurs très bien depuis un an. Mais nous avons également introduit des poches de diversification vers ces thématiques dans l’ensemble de nos fonds. Notre principal credo est la résidence gérée. De la résidence étudiant, en passant par la résidence senior ou le coliving, jusqu’aux établissements de santé long séjour. C’est-à-dire post-opératoire, réadaptation, EHPAD, clinique psychiatrique. Mais également les actifs d’hôtellerie, de para-hôtellerie, et d’enseignement. PF Hospitalité investit sur l’ensemble de ces classes d’actifs, plutôt hors de France.
Et pour les autres SCPI ?
Loïc Hervé – Sur des véhicules comme PF Grand Paris, PFO2 et, bien sûr, PFO – notre SCPI diversifiée -, nous nous autorisons à investir dans ce type d’actifs à des fins de diversification. Pour bénéficier à la fois des avantages du résidentiel, avec des niveaux de risque faibles. Et des avantages de l’immobilier d’entreprise, avec des baux sécurisés de long terme et néanmoins de qualité.
Une classe d’actifs est paraît-il plus particulièrement en train d’émerger, l’immobilier d’enseignement. Etes-vous présent sur ce créneau ?
Loïc Hervé – Oui, et pas assez à notre goût… Mais il y a très peu de produits sur le marché. C’est un secteur de niche, alimenté par des opérations de sales and leaseback ou de création de bâtiments sur mesure pour le compte des opérateurs, c’est-à-dire les écoles. La demande est très forte. Et ce dans tous les pays dans lesquels nous intervenons actuellement. Nous nous positionnons bien entendu à l’achat dès que possible. Si l’on peut marier projet d’école et projet immobilier pour en faire une belle histoire, nous n’hésitons pas un seul instant.
Il nous reste deux minutes. Un petit bilan 2021 de l’activité de Perial, en termes de collecte mais aussi de rendement prévisionnel de vos différentes SCPI ?
Loïc Hervé – Je ne pourrais pas vous donner, à date, des rendements très précis. Puisque ceux-ci ne seront publiés que courant janvier. Ce que je peux vous dire, en revanche, c’est l’on s’achemine vers ce qui sera la meilleure année pour Perial en termes de collecte. Celle-ci va dépasser les 600 M€. Ce qui, avec l’effet de levier, va conduire à un volume d’investissement supérieur à 800 M€ en 2021. Et sans doute plus en 2022. Plus de 700 M€ de nouveaux deals sont déjà sécurisés d’ici la fin du mois d’avril prochain.
Vous visiez, je crois, le milliard d’euros d’investissements ?
Loïc Hervé – Exactement. Avec les engagements que nous avons aujourd’hui sous exclusivité, nous avons clairement dépassé ce niveau. Côté rendements, 2021 est une année plutôt solide. Ils seront dans l’épure de ce que nous avions annoncé, aux alentours de 4,5% – pour faire simple – pour PF Grand Paris et PFO2. Sur PF Hospitalité Europe, il devrait se situer aux alentours de 4%. Mais avec, très clairement, une augmentation significative, conforme à nos feuilles de route, dès le début de l’année 2022. Sur ces produits alternatifs nous avons vécu, je le rappelle, et notamment au premier semestre de l’année 2021, des fermetures liées au Covid. Ce qui a conduit à allonger le temps nécessaire pour réaliser les investissements. Mais nous avons désormais un pipe très solide et, donc, des perspectives d’augmentation très significatives du rendement.
Et la SCPI PFO ?
Loïc Hervé – Enfin, sur PFO, dont le rendement était peut-être un peu en retrait en 2020 (autour de 4,25%) en raison de son exposition au secteur hôtelier et commerce, l’amélioration est aussi très significative. Son rendement 2021 devrait s’établir dans une fourchette de 4,5%-5%. Rendement calculé selon l’ancienne méthode…
Qui changera en fin d’année 2022, on le sait, depuis l’annonce de l’ASPIM sur la mesure des performances des SCPI. Pour résumer, donc, des performances 2021 pour les SCPI de Perial qui seront légèrement supérieures, ou, tout au moins, en phase, si j’ai bien compris, avec celles de 2020…
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A propos de Perial AM(i)
Perial Asset Management gère plus 5 milliards d’euros au 30/09/2021, distribue des produits SCPI, OPCI par l’intermédiaire des CGP, banques privées, compagnies d’assurance, réseaux nationaux et investisseurs institutionnels. Perial Asset Management gère plus de 500 immeubles, plus de 1 400 entreprises locataires pour le compte de ses plus de 55 000 associés, porteurs de parts de SCPI, OPPCI et SCI.
(i) Information extraite d’un document officiel de la société
[1] Dépenses d’investissement.[2] Central Business District.