Pour paraphraser un peu librement Shakespeare, je dirai qu’il se passe quelque chose de pas terrible au royaume de France.
Je veux parler des débats actuels sur le plafonnement, pour les logements neufs bénéficiant d’un avantage fiscal, des commissions de vente des promoteurs, dans le cadre de la loi ÉLAN.
Un nom dynamique pour une loi qui contient sans aucun doute des aspects intéressants. Mais le sujet du plafonnement des commissions soulève bien des controverses.
Du côté de l’accusation, les promoteurs n’apprécient pas, mais pas du tout. Il faut savoir qu’ils sont dans une industrie lourde, qui nécessite beaucoup de capital – il se passe plusieurs années entre l’identification d’un terrain et la livraison d’un immeuble – et qui mobilise aussi des équipes nombreuses : alors, il est vital de vendre et de vendre vite, et pour cela rien de tel qu’une bonne dynamique de vente.
Du côté de l’accusation toujours, les vendeurs sont-ils trop payés ? Ceux qui ne sont pas vendeurs ont l’habitude de le dire. Mais quand le vendeur s’en va faire autre chose, on s’aperçoit parfois qu’il était précieux dans le dispositif. Pas simple.
Donnons maintenant la parole à la défense :
Les prix du logement neuf sont élevés, il serait souhaitable qu’ils soient plus accessibles, et quand l’État donne des avantages fiscaux, il a le droit de poser des règles.
Jusque-là, nous sommes d’accord.
Mais d’où peut bien venir l’idée selon laquelle l’État va faire œuvre utile en contrôlant les marges des entreprises ?
D’abord, en ce qui concerne les prix de l’immobilier, l’ancien aussi est très cher. Là, les promoteurs n’y sont pour rien ! Si l’on veut que les prix soient moins élevés dans le logement ancien comme dans le neuf, c’est à la rareté qu’il faut s’attaquer.
Vous savez, il y a aujourd’hui assez de logements pour la population de 2016. En 2019, nous aurons assez de logements pour 2017. C’est ce décalage entre l’offre et la demande, en se maintenant d’année en année, qui crée une tension sur les prix et les loyers. Que demain il y ait assez de logements, que les jeunes ou les moins jeunes qui travaillent dans les grandes villes ne soient plus obligés d’habiter à une heure de transport de leur lieu de travail, bref, qu’il y ait assez de logements, là où ils sont nécessaires, et ils deviendront accessibles. Mais aucune loi, aucune réglementation sur les prix ou sur les marges ne fera comme par miracle pousser des logements en nombre suffisants…
Mais il n’y a pas que le sujet des logements, il y a aussi celui de l’industrie immobilière qui produit ces logements. Intervenir, par la loi, sur les marges ? Je n’ose imaginer ce qui se serait passé si le gouvernement américain avait contrôlé les marges d’Apple ou de Google – là, c’est une petite parenthèse pour ceux qui se demandent pourquoi une société comme Amazon n’est pas née en France alors que nous sommes le pays de la culture… Bon, je m’échauffe un peu mais j’avoue que je ne comprends pas pourquoi nous ne suivons pas l’exemple des pays qui se sont redressés. Tout près de nous par exemple, la première chose qu’a fait l’Allemagne quand elle allait encore mal, a été de soulager ses entreprises. On connaît le résultat. C’est pourtant simple, les entreprises sont les abeilles ouvrières de l’économie, ce sont elles qui créent des emplois, ce sont elles qui sont à l’origine du niveau de vie.
C’est ce qui m’attriste le plus dans la question du contrôle des commissions, donc des marges. Nos dirigeants gaspillent leur énergie et leur talent en construisant des échafaudages réglementaires complexes qui ne résoudront rien, au lieu de se consacrer aux véritables enjeux. Et on n’en manque pas ! Dans l’immobilier, il y a la construction qui doit rattraper la démographie, il y a la réduction des dépenses énergétiques, il y les critères de confort, de bien-être, de santé, bref, il y a tant à faire !
Voilà, je me suis un peu énervé, mais j’aimerais tellement que nos dirigeants s’occupent vraiment de l’avenir.
J’ai commencé par Shakespeare, je vais conclure avec Woody Allen qui disait :
« Je m’intéresse à l’avenir parce que c’est là que j’ai décidé de passer le restant de mes jours ».
Bonne journée