Quel revirement ! Ceux-là même qui n’avaient pas de mots assez durs pour critiquer les incitations fiscales à l’investissement locatif s’empressent, sitôt revenus aux affaires, de créer un nouveau dispositif, applicable à partir du 1er janvier 2013. Mais pouvaient-ils faire autrement ?
Avec la fin « en sifflet » du Scellier et la désolvabilisation des candidats les plus modestes à l’accession à la propriété, la construction est retombée au plus bas. Les ventes de logements neufs devraient accuser, cette année, une chute de l’ordre de 20 % par rapport à 2011, qui était déjà une année en repli avec 250 000 ventes, appartements et maisons individuelles réunis.
Pour 2012, les professionnels s’attendent à la vente d’environ 75 000 appartements ou maisons de promoteurs et de 125 000 maisons individuelles de constructeurs, soit un total de l’ordre de 200 000 logements pour le secteur privé. La production de logements sociaux par le monde HLM serait, quant à elle, comprise entre 90 000 et 110 000 logements. Soit un total de 310 000 logements neufs, bien éloignés des 500 000 unités annuelles qui seraient, pour certains, nécessaires à une détente du marché immobilier.
Une relance nécessaire
Mesure phare du projet de loi de finances 2013 en ce qui concerne le logement, le dispositif Duflot ne peut pas être qualifié d’innovant. Il reprend l’architecture générale du dispositif précédent, le Scellier, et diffère très peu de sa version dite « sociale ».
Comme le Scellier, le Duflot accorde une réduction d’impôt aux particuliers qui investissent dans un logement neuf « éco énergétique », c’est-à-dire situé dans un immeuble répondant à la norme BBC ou conforme à la RT 2012 pour les permis de construire délivré à compter du 1er janvier 2013. Les investisseurs doivent s’engager à louer logement, non meublé, pendant au moins neuf années en qualité de résidence principale du locataire. Le montant de l’investissement pris en compte pour le calcul de la réduction d’impôt est plafonné à 300 000 euros, comme dans l’ancien Scellier.
Les deux seules différences relevées portent, l’une sur le resserrement en secteur tendu de la localisation des logements (le Duflot s’appliquerait en zone A, A bis, B1 et certaines communes de la zone B2, alors que le Scellier concernait les zones A, A bis, B1, B2 et certaines communes de la zone B3), l’autre sur le montant de la réduction d’impôt (voir ci-après), qui reste toutefois étalée sur 9 ans.
Comme le Scellier social, le Duflot, destiné à « loger les classes moyennes et modestes », impose des plafonds de ressources pour le locataire et des plafonds de loyers inférieurs de 20% aux loyers de marchés. Ces plafonds, de ressources et de loyers, seront précisés par l’Administration, en principe dans les premiers mois de 2013. Comme en Scellier social, la location à un proche est interdite, qu’il fasse ou non partie du foyer fiscal de l’investisseur.
Seule différence, la déduction de 30% opérée sur les loyers, qui figurait dans le Scellier social, ne semble pas être reconduite dans le Duflot.
Réduction d’impôt. Son taux est fixé à 18%, alors que la réduction Scellier, de 25 % à l’origine, n’était plus que de 13% cette année pour les logements BBC. Étalée sur 9 années, probablement décomptées à partir de l’année d’achèvement de l’immeuble, elle est calculée sur le prix de revient de l’investissement, en principe frais compris, plafonné à 300 000 euros (voir exemple en encadré). En cas de souscription de parts de SCPI Duflot – il est très probable qu’il va s’en créer –, la réduction est calculée sur 95% du montant investi, et non 100% comme en SCPI Scellier.
Une relance suffisante ?
Dans sa physionomie actuelle (des modifications peuvent être apportées au cours des discussions parlementaires), le dispositif Duflot offre une réduction d’impôt qui booste le rendement de l’investissement à un niveau honorable, dès lors que l’on reste dans des prix de vente « contenus » (voir exemple ci-dessous). En revanche, à 10 000 euros le m² dans Paris, par exemple, le jeu n’en vaut plus la chandelle, du moins sur le strict point de vue financier. En dehors de ce cas extrême, ce nouveau dispositif a de quoi séduire, surtout qu’il n’a pas à beaucoup redouter la concurrence des autres placements, actuellement, et que les taux d’intérêt des prêts immobiliers restent à un niveau très favorable.
Son principal handicap sera probablement sa complexité, entre zonage, double plafonnage (loyers et ressources du locataire) et « nichage ». L’avantage fiscal procuré par le Duflot entrerait, en effet, dans le plafond de 10 000 euros fixé en 2013 pour l’ensemble des niches fiscales dont bénéficie un contribuable. Autre source d’inquiétude, la réforme annoncée de la loi sur les baux d’habitation risque de refréner l’ardeur de nombreux investisseurs qui préfèreront sans doute attendre de connaitre les nouvelles dispositions légales avant de s’engager.
Pour atteindre l’objectif de 40 000 logements Duflot par an annoncé par le Gouvernement, il faudra donc rassurer les investisseurs potentiels et, surtout, ne pas rendre la gestion locative encore plus difficile qu’elle ne l’est déjà. Sur ce point, les futures SCPI Duflot, en déchargeant l’investisseur de tout souci de gestion et de toute responsabilité dans la location, auront un atout majeur à faire valoir.
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