L’analyse d’Alphavalue.
Au cours de l’année précédente, Unibail-Rodamco a brillamment confirmé son statut de leader incontesté des centres commerciaux en Europe (78% de ses actifs bruts). Tout au long de 2012, le cours (qui a gagné 35% contre 25% pour le secteur) a été soutenu par des nouvelles à chaque fois meilleures : des chiffres solides pour le premier semestre malgré un environnement morose pour la consommation en Europe et une série de communiqués annonçant des refinancements à des coûts toujours plus compétitifs (le groupe a refinancé 4,6 milliards d’euros, soit plus d’1/3 de sa dette brute totale, et a ramené son coût de la dette à 3,4%).
La domination du plus grand groupe immobilier européen (une capitalisation boursière de 17 milliards d’euros, 23% de notre couverture constituée de 18 valeurs immobilières) n’est guère contestable. Ses centres commerciaux de qualité (51% de ceux-ci sont situés en France) affichent un taux de vacance de seulement 2,1%, une croissance organique des loyers nets de 4,2% et une valorisation en hausse de 6% à périmètre constant. Les locataires logés sous les toits d’Unibail-Rodamco ont vu leurs ventes progresser de 2% contre -1% pour les indices de ventes nationaux agrégés. Associés à des bureaux pas si décevants (13% du portefeuille, une croissance des loyers de 6,9% à périmètre constant et encore du potentiel puisque le taux de vacance atteint 10,4% à la suite des récentes livraisons) et à son activité oligopolistique dans les Congrès & Expositions (le chiffre d’affaires a augmenté de 7,7% en 2012), le groupe a battu son objectif de croissance des bénéfices par action(BPA) récurrent à environ 4% avec 6,7% (chiffre du groupe). Il espère désormais atteindre un BPA récurrent de 14 euros d’ici 2017 (un taux de croissance moyen annualisé de 7,8%).
La question évidente est à quel point cet objectif est-il atteignable ? En effet, dans ses centres commerciaux, le taux d’effort (loyer et charges / chiffre d’affaires des commerçants) semble avoir atteint un niveau difficilement durable avec 13,1% en moyenne (en hausse par rapport aux 12,6% de 2011) après s’être accru dans toutes les zones géographiques. Même s’il pourrait être acceptable du fait de la présence de locataires solides et de qualité dans les centres commerciaux, nous sommes convaincus, qu’en France par exemple, l’indexation a augmenté plus rapidement que le chiffre d’affaires des locataires. De sorte que ceci a probablement créé un potentiel de réversion des loyers. De plus, le coût de la dette exceptionnellement faible a probablement permis d’afficher une croissance des BPA plus forte qu’anticipée et a augmenté la maturité moyenne de la dette. Mais cet impact en termes de variation n’est pas reproductible. Finalement, l’anticipation pour le BPA 2013 a été légèrement réduite (dans le détail, le management a réduit sa perspective pour 2013 d’« une croissance du BPA récurrent de 5 à 7% » (annoncée début 2012) à « au moins 5% » et la maturité moyenne de la dette a été allongée de 4,5 à 4,9 années. Cela montrerait une part de prudence pour 2013… ?
La démission surprise de Guillaume Poitrinal (après 8 années réussies en tant que Directeur Général) sans raison particulière (exceptée des projets entrepreneuriaux personnels) ouvre une nouvelle période. Il sera remplacé par Christophe Cuvillier, ancien Directeur Général de la FNAC et de Conforama, qui devrait poursuivre la stratégie mise en place jusqu’à présent. Mais chaque Directeur Général a également sa propre vision ce qui injecte une part d’incertitude.
Finalement, nous continuons de croire qu’il y a de meilleurs paris dans le secteur de l’immobilier de commerce (6 valeurs, une capitalisation boursière de 36 milliards d’euros) telles que la française Mercialys, la britannique Intu et la quelque peu risquée hollandaise Corio. Toutes nos méthodes de valorisation affichent un faible potentiel de hausse restant et même un potentiel de baisse (la prime sur la Somme des Parties est actuellement de 17%). Passez votre chemin sans vous arrêter, les investisseurs ont commencé à en prendre conscience.
Il se pourrait que le cercle vertueux de la réussite apportant davantage de liquidité ait finalement rendu la valeur chère.
Pierre-Loup Etienne
Analyste foncières, AlphaValue