« Le temps se comporte comme un gentleman » pour la SCPI Pierre Plus.
Les conseillers en gestion de patrimoine (CGP) s’affrontent parfois sur les qualités supposées des vieilles SCPI qui ont pu acquérir leur patrimoine à moindre coût tout au long de leur parcours face aux jeunes SCPI dont les immeubles seraient mieux adaptés au marché locatif et qui nécessiteraient moins de travaux de remise aux normes. Limiter le débat entre ces deux thèses, ce serait nier que de nombreuses SCPI ont collecté massivement ces dernières années rajeunissant alors beaucoup leur patrimoine. Parmi celles-ci, on retrouve la SCPI Pierre Plus, gérée par Ciloger, la plus exemplaire des fausses vieilles SCPI !
La SCPI Pierre Plus à forte dominante de commerces (89 % de son patrimoine), créée en 1991, a tout d’une SCPI de la dernière génération. Créée sous l’impulsion de la Banque espagnole Caixa en 1991, sa gestion a été reprise par Ciloger en 2006 lorsque la banque espagnole a fermé ses agences dans l’Hexagone. A l’époque, sa capitalisation ne dépassait pas 21,7 millions d’euros dont plus de la moitié avait été collecté lors des deux années précédentes.
Ciloger a alors commencé à la commercialiser auprès des conseillers en gestion de patrimoine indépendants (CGPI) qui ont commencé à souscrire régulièrement pour que sa capitalisation atteigne 85 millions d’euros à la fin 2009. L’année suivante, tout se précipite alors que la défiance envers les marchés financiers atteint son comble. Les souscriptions affluent pour cette SCPI que les CGPI commençaient à bien connaître. Elles ne seront plus les seules car, cette année-là, la collecte a été élargie au réseau des Caisses d’Epargne. Le flux de ces souscriptions est tellement vigoureux que Ciloger décide de fermer la collecte pendant trois mois, à la fin de l’été. Néanmoins, la SCPI termine l’année 2011 en ayant plus que doublé de taille avec une capitalisation portée à 207 millions d’euros. Reste à transformer ce succès commercial en réussite de gestion !
Plutôt que d’investir le plus rapidement possible en baissant la garde sur la sélection des acquisitions, la société de gestion préfère prendre un peu de temps pour investir. Elle restera plusieurs mois en sous-investissement… et cela aura des conséquences sur la distribution versée aux porteurs de parts. Les revenus distribués par part, qui étaient de 57,00 euros en 2010, passeront l’année suivante à 54,60 euros, puis à 49,20 euros en 2012. Ce n’est qu’à partir de 2013 que les investissements tiennent leurs promesses et que la SCPI Pierre Plus peut remonter sa distribution à 50,40 euros par part. En 2014, l’objectif de 53,40 euros sera respecté et la hausse devrait se confirmer en 2015. La situation peut paraître paradoxale : au moment où le seuil symbolique de 5 % de rendement de l’ensemble des SCPI d’immobilier d’entreprise semble menacé, la SCPI Pierre Plus voit son rendement repasser cette barre en 2014 pour atteindre 5,01 % cette année. La baisse temporaire des revenus distribués a été partiellement compensée par l’évolution du prix des parts qui est passé de 1 030 euros à 1 066 euros de 2001 à la fin 2013. De sorte qu’à la fin 2013 le taux de rendement interne des parts ressortait à 4,08 % sur 5 ans à 7,17 % sur 7 ans et à 11,14 % sur 15 ans.
La remontée des revenus distribués, c’est la récompense d’une gestion privilégiant le long terme explique, Pierre Pelabon, directeur de l’Asset chez Ciloger : « on doit chercher à créer de la valeur sur le long terme » pour ce professionnel « pas question de se limiter à l’encaissement des loyers » car « quand nous investissons dans un actif nous opérons des choix en fonction d’options (emplacement, qualité du locataire, couple rendement/risque…) prenant en compte sa création de valeur à venir ». La très forte collecte de 2011 a certes été un peu longue à investir, mais elle a permis à Pierre Plus de mettre la main sur sa pépite, le centre commercial de Sainte-Eulalie en Périphérie de Bordeaux. Il est très bien situé, en bordure de l’A10 (L’Aquitaine). Ce centre commercial qui reçoit déjà plus de 3 millions de visiteurs par an, va voir sa chalandise grossir avec l’ouverture prochaine d’un complexe de cinéma à proximité d’une zone qui poursuit son urbanisation et qui compte déjà deux « retail park ». Pour Pierre Pelabon, «acquérir en totalité un actif de 55 millions d’euros comptant 56 locataires distincts autour d’un centre Leclerc a offert à Pierre Plus une opportunité formidable en terme de couple rendement/risque». Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que les centres commerciaux sourient à cette SCPI. En 2012, Pierre Plus a revendu les 8 % qu’elle détenait depuis 1995 dans la galerie commerciale de Gonfreville-L’Orcher (76). Cette cession a fait ressortir une plus-value comptable de 3 324 016 euros, soit 222% par rapport au prix de revient (1 499 984 euros).
Après cette cession, il ne reste plus à Pierre Plus que deux actifs acquis avant 2000 : une boutique rue d’Alesia à Paris et des locaux commerciaux au centre de Vernouillet (78). Le patrimoine de cette SCPI n’a donc rien à envier à ses concurrentes les plus récentes. Elle leur dame d’ailleurs le pion en disposant du meilleur taux d’occupation de toutes les SCPI investies en commerces avec un taux de 99,09 % au 30 septembre dernier pour ses 74 actifs, dont 4 immeubles de bureaux, répartis auprès de 185 locataires.
Dans cet excellent taux d’occupation, Pierre Pelabon veut voir l’autre atout de Ciloger, la réactivité. «Quand l’environnement change vite, c’est une nécessité » explique-t-il, en ajoutant qu’il exige que les prestataires de la société de gestion soient au diapason. Cette réactivité vaut pour la signature des baux pour lesquels il « garde la main » comme pour les renégociations lorsqu’il sait faire un effort pour sécuriser la présence d’un locataire. Le travail de recherche de locataires a pris un nouveau cadre depuis que 80 % des baux sont signés avec des enseignes nationales (Casino, Simply Markets, Sinequanone, Princesse Tamtam, Casa, Léon de Bruxelles ou Boulanger…).
Face à la difficulté aujourd’hui de trouver des investissements offrant des rentabilités aussi élevées qu’au début des années 2000, Pierre Plus tente de maîtriser sa collecte (entre 20 et 25 millions attendus cette année, 9 millions au premier semestre). Ce qui n’empêche la SCPI d’avoir réalisé de belles opérations avec des investissement premium (une boutique dans le huitième arrondissement de la capitale offrant un rendement immobilier de 5,9 %, un commerce rue d’Antibes, l’artère la plus commerçante de Cannes pour 5,2 %) contrebalancés par un rendement de 6,9 % obtenu avec des commerces alimentaires de proximité situés dans le dix-neuvième arrondissement de Paris et dans cinq villes de la région parisienne.
Au 31 décembre dernier, le rendement immobilier du patrimoine, expertisé à 213 millions d’euros, ressortait à 7,07 %. Compte tenu de la prime du prix des parts donnant une capitalisation de 243,8 millions à la fin 2013, un investisseur achetant des parts de cette SCPI obtient alors un rendement immobilier de 6,2 %, fort honorable pour de l’immobilier géré et mutualisé. La différence entre ce rendement immobilier et le rendement issu de la distribution des parts est à mettre sur le compte des charges et de la mise en réserve des bénéfices. En 2013, le résultat net s’est élevé à 12,6 millions, distribué à hauteur de 11 millions, ce qui a permis de porter le report à nouveau à 2,5 mois de distribution (supérieur à la moyenne des SCPI qui est de près de 1,7 mois). Les charges de l’exercice 2013 ressortent à 16,4 %, très sensiblement moindre que le taux normatif des SCPI qui s’élèvent plutôt à 25 %. Cela s’explique par deux facteurs : premièrement, le patrimoine est essentiellement composé de commerces, ce qui suppose moins de travaux que les bureaux ; deuxièmement ce patrimoine est très récent. De sorte que les dotations pour travaux ne dépassent pas 2 % des loyers. En revanche, la rémunération de la société de gestion est pour sa part plutôt plus élevée que pour les concurrentes de Pierre Plus avec un ratio de 10,5 % contre 9,5 % pour ses concurrentes. Un bonus mérité au vu du taux d’occupation exceptionnel de cette SCPI.
Forte de ces atouts, la SCPI Pierre Plus paraît bien armée pour affronter la conjoncture déprimée que traverse la consommation des Français. Attention toutefois à conserver une collecte maîtrisée qui ne déséquilibre par la bonne rentabilité actuelle de cette SCPI. Pour l’heure, elle affichait un surinvestissement rassurant de 7,2 millions d’euros à la fin du premier semestre.
Christophe Tricaud
Rédacteur en chef – pierrepapier.fr