aujourd’hui, nous allons parler des prix de l’immobilier. Ils sont élevés. Cela doit-il donner le vertige ?
D’abord, je ne suis pas plus que vous abonné aux statistiques de l’année prochaine ou à celles de dans dix ans. Ensuite, je suppose qu’une discussion de type café du commerce ne vous intéresse pas plus que moi. Je vous propose donc une approche un peu inattendue, mais qui peut enrichir le sujet.
Quand on s’interroge sur le niveau des prix, raisonnables ou pas raisonnables, il y a en fait une question sous-jacente : est-ce que demain, et après-demain, il y aura, encore et encore, des acheteurs ?
Ainsi posée, la question devient intéressante, car il est en train de se passer quelque chose. Bon, j’avoue, pour comprendre ce qui se passe, nous devons nous arrêter sur deux concepts.
Le premier, c’est l’asymétrie, « l’ » puis asymétrie. Vous savez, un dicton financier dit que la Bourse monte par l’escalier et descend par l’ascenseur. Les performances en Bourses sont asymétriques, les surprises sont presque toujours des mauvaises surprises : les changements de 30, 40 ou 50 % en un an sont en général dans le sens négatif. Or l’immobilier lui, n’est pas asymétrique. Les + 5 sont aussi fréquents que les – 5 %.
Le second concept, c’est le kurtosis. K-u-r-t-o-s-i-s. Un mot grec pour désigner quelque chose de très simple. En Bourse, il y a un peu moins d’années à + ou – 20 % que d’années à + ou – 10 %. On pourrait dire que la courbe des performances annuelles est très plate, et surtout très large. Vous trouvez même, à de grands moments de crise, des mouvements de – 70 %. Alors qu’en immobilier, les performances positives ou négatives sur un an sont toujours à un chiffre : c’est une courbe très étroite, le kurtosis de l’immobilier est faible.
Et voilà. Les grands investisseurs dans le monde, les fonds de pension, les compagnies d’assurances, les fonds divers et variés, utilisent ces modèles, et ces modèles n’ont pas bien résisté à la crise de 2008. Il a donc fallu les compléter. Et qu’a-t-on ajouté au fameux couple risque / rentabilité ?
Eh bien justement, on a ajouté l’asymétrie – est-ce que les surprises sont plutôt du mauvais côté- et on a ajouté le kurtosis – est-ce que je risque de perdre ma chemise en quelques mois. Et là, grande découverte : la Bourse a une asymétrie forte, aïe, et un kurtosis large, re-aïe. Alors que les infrastructures et l’immobilier ont une asymétrie très faible, génial, et un kurtosis très étroit, re-génial.
Que pensez-vous qu’il est arrivé ? Les modèles revus et corrigés ont décidé de donner aux infrastructures et à l’immobilier un peu plus de poids dans les portefeuilles. Logique. Mais c’est là qu’on peut être pris de vertige ! Car on parle, à l’échelle mondiale, d’une masse d’environ 100 000 milliards de dollars. Pas de mystère, 70 % correspondent à l’épargne des ménages, 30 % aux excédents des pays exportateurs. Mais si 1, 2 ou 3 % de cette montagne de capitaux se déplacent vers l’immobilier, ce sont des montants que les marchés ne peuvent pas digérer. Heureusement, ces évolutions sont toujours très lentes et sur de nombreuses années.
Le kurtosis et l’asymétrie nous donnent ainsi deux réponses :
- D’abord, pourquoi depuis quelques années les prix montent, partout dans le monde. Autant le savoir.
- Ensuite, nous ne sommes qu’au tout début d’une évolution structurelle des grands portefeuilles, évolution qui va se dérouler sur une ou deux décennies.
Bien sûr il y aura des tempêtes, il y aura des secteurs plus ou moins porteurs que d’autres, mais il y aura des flux de capitaux, encore et encore, pendant des années.
Mes amis professionnels de l’immobilier, vous avez choisi le bon endroit, et le bon timing. Cela ne veut pas dire que la vie sera facile, mais elle sera intéressante.
Je vous souhaite une bonne journée.