Les sociétés foncières cotées ou les SCPI sont majoritairement orientées vers l’immobilier d’entreprise. C’est ce qui permet aux investisseurs individuels d’avoir accès à un placement qui, autrement, serait hors de portée de la plupart d’entre eux. On comprend aussi l’intérêt des investisseurs institutionnels (compagnies d’assurance, fonds de pensions, société d’investissement) pour le placement en mètres carrés de bureaux, d’entrepôts ou de locaux commerciaux. : ils sont ainsi en prise directe avec l’activité économique. Mais pourquoi ces mêmes investisseurs institutionnels ne s’intéressent-ils pas plus au logement et, plus précisément, pourquoi ne reviennent-ils pas davantage sur ce segment de marché après la crise financière ? C’est l’une des questions auxquels les professionnels étaient invités à réfléchir lors du colloque organisé le 19 octobre à Paris par l’IEIF, Institut de l’épargne immobilière et foncière.
Alain Tourdjman, directeur des études économiques et de la prospective à BPCE, procède à un rapide rappel de l’histoire récente du logement en France : forte croissance dans les années 60 et 70, jusqu’au milieu des années 80, avec une construction fortement aidée, qu’il s’agisse de la construction sociale ou privée, et des taux d’intérêt réels négatifs. Ensuite, jusqu’à la fin des années 90, avec le recul de l’inflation, l’endettement devient plus difficile et on ne construit plus assez. Dans les années 2000, avec des taux bas, on peut de nouveau s’endetter et la production de logements remonte. Mais, vers 2006-2007, le logement devient trop cher et le modèle se grippe, avant même que la crise financière ne bloque tout. Depuis, on peut constater une reprise des transactions, mais la construction reste à un niveau faible.
Dominique de Sauza, président de l’Union des constructeurs immobiliers, rappelle cette vérité d’évidence : pour construire, il faut vendre. Or, en 2008, les ventes se sont arrêtées et, en 2009, les constructeurs ont vendu ce qu’ils n’avaient pu vendre avant. Des projets ont été abandonnés, les recherches de terrains ont été arrêtées. Maintenant il faut repartir, avec des aides au logement réduites et une réglementation plus contraignante (normes thermiques notamment).
Ainsi que le constate Bertrand de Feydeau, président du conseil d’administration de Foncière développement logements, les institutionnels s’interrogent et se demandent s’ils ne sont pas sortis à tort du logement. Mais ils se heurtent au problème du rendement, tombé trop bas : la hausse du prix des logements pèse sur la rentabilité de l’investissement locatif. Et pourtant, la part du revenu consacré par les ménages au logement fait qu’il y a là une source de revenus réguliers.
Pierre Shoeffler, senior advisor de l’IEIF, dresse un constat similaire : l’immobilier d’entreprise est très sensible à l’emploi et au cycle économique. En théorie, le logement offre des perspectives de rendement moins volatiles, avec un lissage de la performance. Mais les investisseurs voient que son rendement, s’il est plus stable, est aussi plus faible. Ils notent aussi que le rendement locatif peut être menacé par les changements de fiscalité. En ce domaine, il faudrait une grande stabilité.
La construction de logements neufs à des prix raisonnables ne pourrait-elle pas permettre de retrouver des rendements plus élevés ? Ce n’est pas évident, note Dominique de Sauza : alors que le réglementation est plus contraignante et que les coûts de production ont plutôt tendance à s’élever, la seule variable d’ajustement pourrait être le foncier. Mais la question du foncier n’est pas une question simple…
Que peut retenir l’investisseur individuel d’un tel débat ? La conclusion est, à notre avis, mitigée : certes, la hausse des prix dans les grandes villes menace la rentabilité de l’investissement collectif dans le logement. Mais le propriétaire bailleur qui loue en direct un logement a-t-il une idée juste de la rentabilité de son investissement ? Ne court-il pas un risque s’il ne peut acheter qu’un logement locatif, en faisant reposer la rentabilité de son placement sur la solvabilité d’un seul locataire ? Avoir des parts d’un produit d’investissement collectif permet de répartir les risques et offre, en fin de compte, une plus grande sécurité.
Gérard Horny
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