Quelle claque ! Au cours du mois dernier, le secteur immobilier couvert par AlphaValue (16 foncières européennes cotées pour une capitalisation boursière totale de 72 milliards d’euros) a perdu autant que ce qu’il avait gagné un mois plus tôt. La chute aura été deux fois plus importante que celle du marché : -8.7% contre -4.8%. C’est le même mécanisme qui a été responsable de l’envolée de la valorisation de la pierre-papier, c’est-à-dire un coût du capital meilleur marché, et qui a conduit à cette rapide correction. La hausse a été portée par la politique monétaire non orthodoxe (quantitative easing) du Japon, la baisse est la conséquence des inquiétudes sur le rythme auquel la version américaine va se terminer. Des éléments que personne ne peut réellement maitriser.
Mais ceci soulève un point. En termes d’actifs, l’immobilier coté a épuisé son potentiel. Nous avions mis en avant au mois de mars un élément évident : le plus liquide des titres, Unibail-Rodamco, se traitait avec une prime par rapport à ses pairs et se traite dans tous les cas avec une prime sur son ANR. Unibail Rodamco a perdu 11% au cours du mois passé. Corio, un comparable proche d’Unibail excepté en termes de taille, a suivi le même chemin.
Sans économie de coût sur le passif, l’immobilier est confronté à une tendance plutôt terne dans les bureaux et à un faible pouvoir de négociation dans les centres commerciaux puisque les consommateurs européens, qui ont des budgets serrés, se détournent des magasins pour acheter sur Internet. Dans les bureaux, la tendance n’est cependant pas uniforme puisque l’on peut distinguer une forme de résistance à Londres, bien qu’elle soit maintenant plutôt concentrée sur le West End.
Sans espoir de gains en termes de capital, les fondamentaux du secteur ne sont pas attrayants avec un rendement des capitaux employés (ROCE) à moins de 4% contre un coût moyen pondéré du capital (CMPC) à 6,5%-7% (6,4% pour Unibail). Ce n’est pas tenable à moins que l’on ne soit convaincu que la meilleure façon de se protéger contre la tactique de répression financière actuellement menée par les gouvernements soit de détenir de l’immobilier. Ce n’est pas si convaincant car il faudrait que les loyers résistent. Sauf si quelqu’un a le courage de se lancer sur un IVG en pleine restructuration de son bilan, il n’y a pas beaucoup d’opportunités au-delà d’un Corio ou d’une Foncière des Régions.
Pierre-Loup Etienne
Analyste foncières, AlphaValue