Et voilà que les ventes à la découpe d’immeubles consécutifs à leur cession par un bailleur institutionnel reviennent sous les feux de l’actualité.
A l’occasion du rachat par Paris-Habitat d’un immeuble, situé dans le XIXème arrondissement de Paris, vendu à la découpe par Gecina, Bertrand Delanoë, le Maire de Paris dénonce le fait que « de nombreux locataires parisiens subissent le phénomène des ventes à la découpe, lorsqu’un immeuble appartenant à un seul propriétaire est vendu par lots. Ils reçoivent alors, souvent avec une grande brutalité, des congés pour vente, ce qui a pour conséquence de les chasser de leurs logements, quand ils sont dans l’impossibilité de l’acheter ».
La contestation des ventes à la découpe a marqué un pic lorsqu’à la fin des années 90 des fonds opportunistes ont massivement racheté une partie du parc résidentiel institutionnel pour les revendre rapidement à la découpe. Le phénomène est aujourd’hui moins visible en raison de la forte atténuation du rythme du désengagement des institutionnels des logements. La source est presque tarie puisque le parc de logements détenus par les institutionnels et les congrégations religieuses se réduit aujourd’hui à 200 000 unités d’habitation, soit six fois moins qu’en 1985. Les assureurs qui étaient de grands propriétaires n’ont plus ressenti le besoin de détenir ce type d’actifs peu rentables quand ils ont pris conscience des effets durables de la désinflation… Le flux de cession des immeubles détenus par des institutionnels est maintenant devenu si faible que l’on peut se demander si la meilleure façon de lutter contre les conséquences néfastes pour les locataires n’est pas comme vient de le faire la Mairie de Paris d’utiliser ses ressources et celles des organismes sous sa tutelle pour racheter les immeubles mis sur le marché par les institutionnels…. Car il est vrai que face à l’attrition du parc locatif du marché libre produit des effets sociaux lourds de conséquences pour les locataires concernés.
Qu’importe que le phénomène soit aujourd’hui moins visible, le maire de Paris n’en réclame pas moins à la Ministre du Logement et de l’Égalité des Territoires une loi pour interdire les congés délivrés aux locataires lors de la vente par lots d’un immeuble. De son côté, la ministre, Cécile Duflot, « estime nécessaire d’encadrer, par modification législative, la possibilité de mise en copropriété et de congé-vente par le bailleur ».
Si une telle disposition devait voir le jour, se juxtaposant à une législation qui déjà tente partiellement d’encadrer ces situations délicates, on relèvera simplement qu’elle interviendrait au moment même où le gouvernement réfléchit à imposer aux institutionnels de revenir investir sur le secteur résidentiel. Ce qui ne facilitera pas – on peut le comprendre – leur adhésion à ces nouvelles obligations.
Par ailleurs, mais tout dépendra comment les dispositions d’encadrement des congés pour vente seront rédigées par le législateur, il convient de se demander quelles seront les conséquences de celles-ci pour les SCPI fiscales (Robien, Scellier….). Les souscripteurs de ces SCPI ont investi le plus souvent en raison d’un bonus fiscal. Mais leur investissement a également été motivé par l’espoir d’une revente dans de bonnes conditions au terme de leur obligation pluriannuelle de détention de leurs parts de SCPI. La hausse des prix de l’immobilier a répondu à ces espoirs. Mais ces derniers seraient douchés si d’aventure la réalisation du patrimoine des SCPI fiscales investies dans le secteur résidentiel ne pouvaient s’opérer correctement, car leurs locataires auraient acquis des droits modifiant les grands équilibres de leur investissement. L’insécurité qui en résulterait risque de porter un coup de canif dans la confiance des français à l’égard de la pierre-papier. Un comble alors même que les épargnants investissant dans les SCPI ont échappé à la série de scandales qui ont affecté les investissements locatifs soutenus fiscalement réalisés en direct.
Christophe Tricaud
Pierrepapier .fr