C’est le pronostic que livre Laurent Saint Aubin, gestionnaire actions spécialiste de l’immobilier européen chez Sofidy, explications à l’appui. Une opinion fondée notamment sur les perspectives d’amélioration de la structure financière des foncières, et sur la visibilité intrinsèque du secteur dans un contexte d’incertitudes économiques.
La surperformance des valeurs foncières par rapport au marché actions depuis le début de l’année est d’une ampleur inédite : la progression (dividendes nets réinvestis) s’élève à +10,7% à fin août, là où l’indice Eurostoxx 50 est en recul de – 5,1%.
Taux bas et qualités spécifiques au secteur
Ce phénomène tient essentiellement à deux éléments :
- Une reprise économique suffisamment molle et fragile en Europe pour garantir le maintien, encore pour une longue période, d’une politique monétaire expansionniste qui se traduit par des taux d’intérêt sans risque proches de zéro voire négatifs sur dix ans en Allemagne ou en Suisse.
- La prise de conscience des qualités uniques du secteur en termes de surperformance moyenne (+9,3% par an sur les vingt dernières années incluant une contribution des dividendes supérieure à 40% de la progression) et de réduction de la volatilité (l’intégration d’une poche d’immobilier coté représentant 50% d’un portefeuille d’actions aurait réduit la volatilité moyenne de 10,23% à 8,71% sur les trois dernières années).
Désormais un secteur boursier à part entière
A cet égard, la création d’un secteur immobilier à part entière représentant 3,6% de la capitalisation boursière globale, par les fabricants d’indices MSCI et S&P, effective depuis le 1er septembre, constitue une formidable opportunité pour populariser cette thématique en sus des flux entrants qu’il va continuer de générer. Il est légitime dans ces conditions de s’interroger sur la persistance de cette surperformance dans les mois à venir. Autrement dit : est-il temps de prendre ses bénéfices sur le secteur ou bien la surperformance peut-elle se nourrir de perspectives nouvelles ?
Poursuite de cette tendance favorable
Pour notre part, nous croyons que le secteur poursuivra sur une tendance favorable par rapport aux indices généralistes pour deux raisons :
- La valorisation des foncières va continuer de réserver des surprises positives en raison de la poursuite de la réduction des coûts de financement qui s’étendra au-delà des plus grands acteurs. A cet égard, nous avons été favorablement impressionnés par l’émission obligataire de Citycon (2Mds de capitalisation boursière seulement), une foncière scandinave axée sur les centres commerciaux, qui a levé le 30 août dernier 350 millions à dix ans avec un coupon fixe de 1,25%. Associée à une tendance à la reprise des loyers qui devrait s’affirmer dans le secteur des bureaux, cette situation pourrait conduire à des relèvements de dividendes. Rappelons, qu’aux cours actuels, le rendement global 2016 estimé des valeurs de l’indice dépasse 3,5%.
Des niveaux de valorisation raisonnable
En outre, les experts font pleinement jouer en fin d’année les variations de taux de capitalisation dans leur modélisation, variation qui se traduira cette année par une ample compression. Les niveaux de multiples du secteur ne nous paraissent pas, dans ces conditions, excessifs.
- En termes relatifs, le marché va continuer de rechercher des valeurs offrant une visibilité supérieure compte tenu, encore une fois de la fragilité de la reprise économique dans un contexte potentiellement anxiogène pour les agents économiques. Les foncières, avec leur chiffre d’affaires embarqué et la forte visibilité qu’ils offrent sur les niveaux de distribution de dividendes, répondent à cette attente et devraient continuer de surperformer par rapport aux indices généralistes, particulièrement en cas de correction des marchés actions. En outre, certains acteurs du secteur ont su construire une base de croissance interne solide en accroissant la part des développements internes dans leur activité (Altarea-Cogedim et Unibail-Rodamco sur le segment du commerce, Beni Stabili et Icade en bureaux, Buwog dans le résidentiel). Enfin, notons que la profondeur du secteur (qui s’étend du résidentiel « acyclique ») au bureau non prime « sur-cyclique » permet aux gestionnaires spécialisés de jouer sur la sensibilité au cycle économique.
Manque d’acteurs sur les secteurs porteurs
Au final, le risque serait que le secteur soit victime de son succès. Nous regrettons en effet la pauvreté du paysage en matière d’introduction en Bourse, en particulier en France, sur des segments porteurs (détention des murs de résidences de service pour personnes âgées, résidences étudiantes, entreposage pour les particuliers, murs de data centers …).
A propos de Laurent Saint Aubin
Laurent Saint Aubin a débuté sa carrière en 1986 comme analyste financier à la Banque de l’Union Européenne avant de rejoindre la société de Bourse Ferri puis le CCF. Il a été ensuite directeur général d’ING France Securities en charge des activités de marché Actions à Paris, puis, à compter de 2006, responsable des activités de vente et de recherche sur l’immobilier coté au sein du groupe Aurel BGC. Membre de la SFAF, il a reçu en 2012 le trophée du meilleur analyste des sociétés d’investissement immobilier cotées (SIIC). Depuis 2014, il gère le FCP Sofidy Sélection 1, où il développe une gestion discrétionnaire visant à « surperformer, via une exposition aux actions du secteur immobilier de l’Union européenne, l’indicateur de référence FTSE EPRA/NAREIT Euro Zone Capped dividendes nets réinvestis ».