A l’annonce du dépôt de bilan de deux sociétés espagnoles contrôlant à elles-deux 30,8 % du capital de l’une des plus grosses foncières cotées à Paris, Gecina, les observateurs et le marché s’interrogent sur l’avenir de la société.
En Bourse, l’annonce a donné lieu à des attaques sur le titre Gecina qui a abandonné mercredi 3 octobre 4,62 %, puis 1,14 % jeudi pour se ressaisir mollement vendredi (+ 0,79%) en terminant vendredi soir à 76,70 euros.
La mise en faillite des sociétés espagnoles Alteco et MAG Import appartenant aux deux grands actionnaires espagnols de Gecina, Joaquin Rivero (16%) et Juan Soler (15%) est due au non renouvellement d’un prêt syndiqué de 1,6 milliard d’euros. Selon le quotidien El Païs, le syndicat de treize banques n’aurait pas été renouvelé du fait du refus d’un seul établissement : le français Natixis, créancier de J. Rivero pour 142 millions d’euros et de Juan Soler, pour 124 millions. Le motif de ce non-renouvellement du syndicat tient au fait que l’une des trois conditions du renouvellement du crédit syndiqué n’avait pas été remplie, à savoir la levée de la saisie par la justice française des dividendes versés par Gecina. Cette décision remonte à l’ouverture d’une plainte pour conflits d’intérêts, il y a quatre ans, contre Joaquin Rivero : il était alors président de Gecina et avait fait racheter entre autres une société espagnole lui appartenant (Bami). Il faut donc prendre ses distances avec l’affirmation de El Païs puisque les titres étant sous séquestre de la justice française, ils ne sont donc pas immédiatement disponibles pour Natexis et consorts dont on ne connaît d’ailleurs pas exactement la nature des sûretés qui leur ont été consentie. De sorte que les craintes de « retour de papier » émises par le courtier Oddo (qui reste à alléger sur le titre) semblent à ce jour un peu précoces. Ces craintes ont aussi relayées par UBS qui explique la réaction de la Bourse par l’accroissement du risque potentiel à court terme pour le groupe. Selon l’analyste, les banques espagnoles qui ont participé à ce prêt syndiqué devraient recevoir rapidement les titres qui leur sont dues.
Mais il y a aussi les optimistes. Selon le cabinet d’analyse indépendante Alphavalue, Metrovacesa pourrait absorber Gecina, dont la foncière espagnole détient déjà 27%, devenant le premier actionnaire de Gecina après le dépôt de bilan de ses deux autres actionnaires importants. Toutefois, ce serait faire peu de cas de la problématique actuelle de la foncière espagnole qui ne dispose actuellement pour l’essentiel de son cash flow que des dividendes que lui verse Gecina. Pour le reste, Metrovacesa dont les banques ont pris le contrôle possède surtout des réserves foncières que la situation économique du royaume ibérique rend difficilement constructibles à court et moyen terme. L’actif net réévalué de Metrovacesa est d’ailleurs en butte à des critiques de certains observateurs qui jugent que les valeurs historiques figurant au bilan n’ont pas grand-chose à voir avec la réalité actuelle….
Reste à imaginer un deal global, avec l’entrée en lice d’un acquéreur reprenant les participations des deux sociétés en dépôt de bilan ainsi que celle de Metrovacesa. Il n’est pas sûr que les banques espagnoles y soient prêtes car la société espagnole sans sa participation dans la société d’investissement immobilier cotée (SIIC) poserait la question même de sa survie. Néanmoins ce scénario global a pour lui la décote significative qui pèse sur le cours de Bourse. Face à un actif net réévalué de 98,7 euros par action, cette décote ressort à 22%. Elle va s’accroître quand l’ANR intégrera la vraie valeur du centre commercial de Beaugrenelle (75015) dont on peut escompter deux ou trois euros par titre Gecina. Mais Gecina n’est pas Klépierre et la part de 25 % de son patrimoine en logement lui confère toujours un profil hybride qui peut rebuter les « pure players ».
Les analystes ne sont pas les seuls à plonger dans l’expectative. Le conseil d’administration de Gecina traduit mal son embarras. Dans un communiqué, la société indique avoir pris connaissance de l’annonce, publiée dans la presse espagnole le 3 octobre 2012, de la demande de dépôt de bilan de Alteco Gestión y Promoción de Marcas S.L, société contrôlée par Monsieur Joaquin Rivero et détenant 9 778 531 actions Gecina et de Mag Import S.L, société contrôlée par Madame Victoria Soler et détenant 9 567 841 actions Gecina. En guise de réponse, le communiqué se borne à dire « le Conseil d’Administration de Gecina examinera cette nouvelle situation ».
A propos de Gecina
Gecina détient, gère et développe un patrimoine immobilier de 11.6 milliards d’euros au 30 juin 2012 situé à 86% en Ile-de-France. La foncière oriente son activité autour d’un pôle Economique constitué notamment du premier patrimoine de bureaux de France et d’un pôle Démographique d’actifs résidentiels, de résidences étudiants et d’établissements de santé.
Au cours de 76,70 euros, le 5 octobre 2012, la capitalisation boursière de Gecina ressort à 4,8 milliards d’euros. Un dividende de 4,40 euros a été détaché en avril dernier.
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