Julien Guillemet, le responsable de la gestion des fonds immobiliers grand public de Swiss Life Asset Managers,est l’invité de l’émission « Les acteurs de la pierre-papier ». Il détaille la gestion mise en œuvre sur les deux produits – SCPI et OPCI – dont il est en charge, tout en insistant sur l’importance de mesurer la pertinence de la stratégie d’un véhicule immobilier sur d’autres critères que sa seule performance annuelle.
Pouvez-vous nous présenter Swiss Life REIM, devenue depuis peu Swiss Life Asset Managers ?
Julien Guillemet – Swiss Life Asset Managers est l’entité du groupe Swiss Life spécialisée dans la gestion d’actifs. Swiss Life Asset Managers France, l’entité française de Swiss Life Asset Managers, regroupe aujourd’hui 250 collaborateurs, et gère environ 50 Md€, dont 15 Md€ d’immobilier et 35 Md€ environ de titres financiers
Vous gérez aujourd’hui deux véhicules grand public, une SCPI, Pierre Capitale, et un OPCI, Dynapierre. Vous pouvez nous présenter rapidement ces deux produits, leur positionnement, et les résultats obtenus en 2018 ?
Julien Guillemet – Dynapierre est un OPCI qui a été créé il y a 8 ans. Il s’est d’abord construit sur la France, avec un portefeuille investi sur les meilleurs marchés français, notamment Paris, Lille, Lyon. Fin 2017, il s’est ouvert à l’Europe, notamment pour des raisons de diversification et d’un certain nombre d’autres paramètres sur lesquels nous pourrons revenir. Cette stratégie a été payante. En 2018, Dynapierre présente la meilleure performance du marché, en rythme annuel, mais également sur une période de 3 ans. Ce qui est l’objectif recherché, le portefeuille de l’OPCI étant précisément construit pour générer la meilleure performance possible sur la durée, et de manière régulière.
Et la SCPI Pierre Capitale ?
Julien Guillemet – Pierre Capitale a délivré un taux de distribution sur valeur de marché (DVM) de 4,5% en 2018, après un taux de 4,25% en 2017, année d’ouverture de la SCPI. Sa spécificité : une double diversification, entre la France et l’Allemagne, et entre les bureaux et les services à la personne. Il est en effet important, selon moi, de diversifier les profils d’actifs, de ne pas se contenter de miser sur la seule croissance économique, mais également de s’intéresser à d’autres indicateurs, comme par exemplela consommation des ménages – pour le secteur hôtelier -, ou la démographie – pour le secteur santé -, afin de disposer de plusieurs moteurs de création de valeur.
Vous avez effectivement tenu l’objectif de rendement annoncé sur la SCPI Pierre Capitale, mais avec une collecte très faible en 2018 (moins de 10 M€), contre plus de 60 M€ en 2017. Cette collecte a-t-elle été volontairement limitée ? Et n’est-ce pas un peu facile de maintenir un rendement quand on ne collecte pas, ou peu ?
Julien Guillemet – Je dirais plutôt qu’il est plus compliqué de faire du rendement quand on ne collecte pas… Il est en effet souvent plus simple d’acheter de nouveaux actifs que de « faire travailler »un portefeuille existant. Il n’en reste pas moins que la finalité, c’est bien de collecter. En 2017, la SCPI a bénéficié d’un capital d’amorçage du groupe, car la volonté était de construire tout de suite une structure de portefeuille qui soit efficiente. Nous avons investi 90 M€ en France et en Allemagne, plus spécifiquement à Paris et à Munich, pour disposer d’un socle performant : c’est ce qui nous a permis de distribuer, dès la première année, 4,25% de rendement. Mais l’important reste que notre stratégie vise avant tout à mettre à l’honneur le couple rendement/risque.
Plus précisément ?
Julien Guillemet – Je trouve que l’on présente un peu trop aujourd’hui les SCPI comme si elles se valaient toutes, en ne mettant en avant que le bon niveau de distribution de certaines, le mauvais niveau pour d’autres. Le type de gestion du sous-jacent, les caractéristiques de la stratégie d’investissement, autrement dit la capacité de la SCPI à investir dans des marchés et des actifs qui sauront préserver les niveaux de loyers et les valeurs d’expertise, sont en revanche totalement occultés. Il est certes important de parler de la performance à court terme. Mais, sachant que les SCPI sont des placements de moyen-long terme, il est également essentiel d’être en mesure d’expliquer comment cette performance pourra être maintenue dans le temps…
Passons à votre OPCI, Dynapierre. Il a réalisé une performance de 5,19% l’an dernier, très au-delà de la moyenne du marché (0,8%). Mais ce bon résultat ne s’explique-t-il pas en grande partie en raison d’une faible exposition de votre fonds aux actifs financiers qui, on le sait, ont fortement reculé en fin d’année 2018 ?
Julien Guillemet – De la même manière, on ne peut mesurer la pertinence de la stratégie de Dynapierre uniquement via sa performance en 2018. Ses résultats sur 5 ans (4,80%) et 3 ans (5,50%) sont déjà plus significatifs. Mais, effectivement, et depuis plusieurs années, la stratégie de l’OPCI a consisté à garder une exposition limitée aux foncières cotées. Cette stratégie a été payante, relativement à celles menées par d’autres OPCI qui se sont davantage investis en actifs cotés et ont donc intégré plus de volatilité et de risque dans leurs portefeuilles. Résultat : certains d’entre eux ont généré des résultats en 2017 excellents, mais beaucoup moins satisfaisants en 2018… L’important est de souligner que la stratégie de Dynapierre est quant à elle essentiellement construite autour de l’immobilier physique. Plus la performance du fonds dépend de sa poche immobilière, moins il est nécessaire d’introduire en portefeuille des actifs financiers. Sauf de façon opportuniste. Depuis le début de l’année, par exemple, nous avons pris des positions sur certaines foncières dont les cours ont décroché en fin d’année 2018, de manière d’ailleurs assez « injuste », car tirés par la baisse de l’ensemble des marchés actions. Cette prise de risque a été payante, elle a permis de dynamiser la performance de Dynapierre depuis le début de l’année. Il n’en reste pas moins que notre stratégie consiste toujours à rester modérément exposé aux classes d’actifs financiers – pour rester régulier dans la délivrance de la performance -, tout en restant opportuniste et, en fonction de l’évolution des cycles et des marchés, à adapter l’importance de cette poche à la conjoncture.
Cette poche immobilier physique, vous l’avez dit, est la plus essentielle à vos yeux. Est-elle gérée de la même manière, au sein de l’OPCI Dynapierre, que dans la SCPI Pierre Capitale ? N’y a-t-il pas une prise de risque supérieure sur l’OPCI ?
Julien Guillemet – Par essence, une SCPI doit construire un portefeuille qui permet de pérenniser des loyers pour assurer le niveau de distribution. L’OPCI, c’est différent. Ce fonds « hybride »ne détient que 65% d’immobilier physique. Si l’on veut un socle de performance qui soit régulier, il faut aller chercher cette performance à la fois sur le plan locatif, mais également sur celui de la création de valeur. Donc, effectivement, il faut prendre des risques. Le marché sort d’un cycle où l’on pouvait acheter, pas n’importe où, mais presque, avec une compression des taux quasi globale au plan européen. Il était donc assez facile d’obtenir des appréciations de valeur, sans nécessairement que ces dernières soient le fruit d’un travail d’asset management très poussé. Cette période est largement révolue. Aujourd’hui, il est impératif de se positionner sur les marchés qui ont la meilleure dynamique économique, tout en prenant des risques d’asset management. Par exemple en achetant des actifs qui ont des baux courts, ce qui permet de capter instantanément des réserves de loyers. Nous pratiquons aussi l’achat « en blanc »- sans locataire -, ce que nous venons de faire à Paris, avec un immeuble boulevard Diderot qui a été loué avant même d’avoir été livré. C’est de cette manière qu’il est possible de construire des plus-values qui ne résultent pas seulement d’une évolution globale du marché, mais bien de la qualité de la gestion mise en œuvre.
Votre credo, je le rappelle, ce sont les actifs de qualité, au cœur des grandes métropoles européennes. Mais vous n’êtes pas le seul sur ce créneau… Existe-t-il encore des poches de création de valeur non exploitées, et où ?
Julien Guillemet – Nous ne sommes pas les seuls, certes, mais notre stratégie est un peu différente de celles de la plupart de nos compétiteurs. Nous sommes, par exemple, présents sur l’Europe du Sud depuis plus d’un an. Cette zone présentait, selon nous, un potentiel de rattrapage de croissance attractif, comparé au nord de l’Europe où les taux de rendement étaient déjà très compressés et les valeurs locatives au plus haut. En Europe du Sud, les taux de rendements nous semblaient moins « agressifs », et la zone semblait disposer d’une réserve d’évolution à la hausse des valeurs locatives. Quelques chiffres : en 2018, les loyers dits « prime » en Europe ont évolué de 5%. A Madrid, ils ont progressé de 12%, et de 15% à Milan. Une ville où la demande placée a évolué de 25% l’an dernier. Il y a clairement un rattrapage de croissance qui dynamise la demande placée, fait baisser les taux de vacance, et agit positivement sur la valeur des actifs « prime ». Depuis un an et demi, nous avons investi plus de 100 M€ en Espagne et en Italie, et les valeurs des actifs acquis et les loyers afférents sont clairement depuis lors orientés à la hausse. Ces investissements génèrent un couple rendement/risque très attractifet contribuent à la performance globale du fonds.
L’IEIF a fait tourner un modèle prédictif qui annonce une nouvelle baisse de la collecte des SCPI en 2019. Quel est votre pronostic sur ce sujet ? Observez-vous, par exemple, un flux de souscription plus important sur Pierre Capitale ? D’ailleurs, est-ce votre objectif pour l’année en cours ?
Julien Guillemet – La volonté est évidemment d’augmenter le rythme des souscriptions sur Pierre Capitale. L’année 2018 n’a pas été exceptionnelle en termes de collecte. La fusion des entités que nous évoquions en début d’entretien a permis d’organiser une équipe commerciale plus structurée dont la vocation est de réaliser les mêmes résultats que ceux obtenus sur l’OPCI Dynapierre dont la collecte, je le rappelle, a été multipliée par 5 l’an dernier (25 M€ de collecte mensuelle actuellement, contre 5 M€ un an plus tôt). Quant au marché, la plupart des sociétés de gestion reconnaissent que l’année 2017 a été une année exceptionnelle. De mon point de vue, 2019 ne devrait pas être fondamentalement différente de 2018.
Propos recueillis par Frédéric Tixier
A propos de Swiss Life Asset Managers(i)
Swiss Life Asset Managers compte plus de 160 ans d’expérience dans la gestion des actifs du groupe Swiss Life. Ce lien étroit avec l’assurance conditionne sa philosophie d’investissement qui a pour principaux objectifs de préserver le capital, générer des rendements stables dans le cadre d’une approche responsable des risques. Ce socle essentiel permet à nos clients d’envisager leurs investissements de manière robuste et à long terme, en toute liberté de choix et confiance financière. Notre approche qui a fait ses preuves permet également à des clients tiers basés en Suisse, en France, en Allemagne, au Luxembourg et en Grande-Bretagne de bénéficier des services proposés par Swiss Life Asset Managers. Au 31 décembre 2018, Swiss Life Asset Managers gérait 206,7 milliards d’euros d’actifs pour le groupe Swiss Life, dont plus de 63 milliards d’euros de placements pour des clients tiers. Swiss Life Asset Managers est également un gestionnaire immobilier leader en Europe (source PropertyEU, Top 100 Investors, décembre 2018).
Sur les 206,7 milliards d’euros d’actifs sous gestion, 55,7 milliards d’euros sont investis dans l’immobilier. Par ailleurs, Swiss Life Asset Managers assure la gestion de biens immobiliers via ses filiales Livit et Corpus Sireo pour 25,3 milliards d’euros. Au 31 décembre 2018, Swiss Life Asset Managers gérait ainsi 81 milliards d’euros de biens immobiliers. Swiss Life Asset Managers emploie plus de 1 800 collaborateurs en Europe.
A propos de Swiss Life REIM(i)
Créée en 2007, Swiss Life REIM (France), est la structure française de gestion d’actifs immobiliers de Swiss Life Asset Managers. Acteur important de l’immobilier en France avec près de 10 milliards d’euros d’actifs, et 380 immeubles gérés et administrés, Swiss Life REIM (France) compte près d’une centaine de collaborateurs qui interviennent dans de nombreux domaines de l’immobilier professionnel (bureaux, commerces, logistique, services à la personne) et résidentiel. C’est aussi le 1er gérant d’OPCI professionnels du marché avec 42 fonds d’investissement sous gestion. À l’international, Swiss Life REIM (France) s’appuie sur une présence de Swiss Life Asset Managers et de ses filiales dans 12 pays d’Europe.
(i) Cette information est extraite d’un document officiel de la société