A l’heure où il semble urgent de mettre en place tous les moyens utiles pour favoriser l’orientation de l’épargne des Français vers le financement de nos TPE-PME, il reste toujours impossible, légalement parlant, à certains acteurs essentiels de cet univers de travailler ensemble.
Le patrimoine financier brut des ménages (4 765 milliards d’euros d’encours fin 2016) est en hausse, avec un taux d’épargne quasi stable (14,5% du revenu disponible brut, juste derrière l’Allemagne, à environ 17%). Face aux taux bas, les Français font cependant le choix de l’immobilisme…
Les Français et leur épargne
En effet, les dépôts à vue ont progressé de 20 milliards d’euros au premier trimestre 2017, contre une hausse de 8 milliards d’euros au quatrième trimestre 2016. Les épargnants n’ont, que peu à perdre en laissant leurs liquidités « dormir » sur leur compte courant – sans rémunération. Ils ne font donc pas le choix d’une plus grande prise de risque pour un meilleur rendement : sur les 110,7 nouveaux milliards d’euros des principaux placements des Français en 2016, les actifs liquides risqués (dont titres de créances ou actions cotées) s’écroulent, avec une collecte de 0,3 Md€ en 2016 contre 5,1 Mds€ l’année précédente[1].
Ainsi, l’an passé, les Français ont consacré 76% de leurs flux d’épargne à des supports sécurisés. Un chiffre en progression par rapport à 2015… En d’autres termes, sur un peu plus de 1 650 € en moyenne par habitant et près de 3 900 € par foyer, moins de 400 € en moyenne par habitant et par an sont consacrés aux placements risqués. |
Quid des professionnels ?
L’arrivée du nouveau gouvernement s’accompagne d’annonces dans de nombreux domaines qui sont directement en liaison avec les sujets qui concernent les CGP (Conseil en Gestion de Patrimoine) et leurs clients. Ainsi, au fil des ans, la fonction du CGP, en tant qu’accompagnant de l’épargnant et d’aide au développement/financement des entreprises, s’est confirmée. Pourtant, aujourd’hui encore, peu d’entre eux accompagnent clients ou entreprises vers le crowdfunding… Alors que les CGP voient dans le crowdfunding un moyen de proposer à leur clientèle d’entreprise un mode de financement alternatif et complémentaire, et que le financement participatif constitue bien évidemment une solution de placement, à risque mais potentiellement fortement rémunératrice, pour leurs clients investisseurs en recherche de rendement et de diversification. De leur côté, les plateformes de crowdfunding recherchent investisseurs et porteurs de projet. Leur business model, basé sur la foule, confirme ce besoin de partenariat et de convergence. En France, seules 2,6 millions de personnes[2] ont contribué en 2016 au financement d’un projet grâce au crowdfunding, soit la petite moyenne de 90€/personne.
Etat des lieux réglementaires de l’apport d’affaires dans le crowdfunding
Crowdequity
L’habilitation des conseillers en investissements financiers ne leur permet en aucun cas de fournir un service de placement (garanti ou non) ou de prise ferme. C’est pourtant ce qu’ils feraient s’ils acceptaient, en tant qu’apporteurs d’affaires (d’épargne d’investisseur ou de porteur de projet en recherche de financement), une rémunération sur le montant investi ou levé : ils intermédieraient des titres vifs !
Crowdlending
« Chaine de commercialisation » non autorisée : en effet, à ce jour, le régulateur considère qu’à partir de 3 personnes, cela constitue une mauvaise visibilité pour le client, un surcoût sans valeur ajoutée et un risque de fonctionnement. Le régulateur n’autorise donc pas un IOBSP à être intermédiaire entre un client investisseur et une plateforme IFP. Donc, que la plateforme soit régulée ou non, à ce jour l’autorité de tutelle ne l’autorise pas à signer des conventions avec d’autres professionnels CIP ou IFP. Ainsi le CGP (CIF ou IOBSP) ne peut pas être rémunéré au pourcentage des montants investis ou des levées de fond par la plateforme en tant qu’apporteur d’affaires. En revanche, les CGP peuvent bien évidemment dire que les plateformes existent et ils peuvent a priori proposer une prestation de conseil[3] et se faire payer par leur client (investisseur ou porteur de projet) en honoraires.
Des solutions ?
« Les conseils en investissement financier et les intermédiaires en opérations de banque et services de paiement doivent pouvoir plus facilement amener les capitaux des particuliers et des institutionnels dans les entreprises qui sont leurs clients, amener leurs entreprises clientes vers les plate-formes et le faire en toute légalité et dans un cadre défini »[4]. Ainsi, les CGP et les plate-formes de crowdfunding sont toujours dans l’attente de solutions de terrain, qui permettent d‘amener plus aisément et donc plus massivement l’argent mobilisé là où il est nécessaire.
[1] Baromètre Mai 2017 Banque de France « Epargne et patrimoine des ménages »
[2] Baromètre annuel du crowdfunding en France – KPMG
[3] Article L 541-1 du CMF
[4] Anacofi : extrait de « 20 POSITIONS / PROPOSITIONS ANACOFI – Fiscalité et soutien aux Entreprises ; sept 2017 »