Pour classifier les opérations de crowdfunding immobilier, deux grilles d’analyse possibles : considérer le type de projet financé, ou bien la destination du bien immobilier financé. C’est l’objet de ce second article de la saga « crowdfunding immobilier : comprendre comment – et dans quoi – vous investissez¹ »…
Si, historiquement, le crowdfunding immobilier s’est tout d’abord immiscé dans le financement de programmes de promotion immobilière, il convient toutefois aujourd’hui de retenir une définition au sens large de la notion de « projets immobiliers», afin de ne pas la restreindre uniquement à l’activité de construction de logements. Deux grandes classifications peuvent alors être dressées selon que l’on considère le type de projet financé, ou la destination du bien immobilier financé…
Le type des projets immobiliers financés
Avant de prendre en considération le type d’acteurs qui aura, in fine, l’usage des biens immobiliers financés (particuliers, bailleurs sociaux, entreprises…), on peut distinguer 5 grandes catégories de projets :
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- Les projets de financement direct de la « maison-mère », c’est-à-dire le promoteur lui-même (voir « Crowdfunding immobilier, acte I : où sont investis les fonds collectés »).
- Les projets visant le financement d’une promotion immobilière, et qui répondent à des standards et procédures bien spécifiques. Dans cette hypothèse, l’opération immobilière est déjà bien avancée : le permis de construire est accordé, les recours des tiers sont purgés, et le niveau de pré-commercialisation est en général d’au minimum 50%. L’investisseur agit alors souvent en tant que refinanceur des fonds propres du promoteur, en substitution ou en complément du capital apporté par ce dernier et des financements bancaires traditionnels. L’horizon de placement de l’investisseur est, dans ce cas de figure, d’environ 2 ans.
- Les projets d’achat-revente ou de marchands de biens, avec ou sans travaux de rénovation. Ce type d’opérations suit des standards généralement moins précis que les projets de promotion immobilière, que ce soit en matière de chronologie ou de structuration des financements. Le niveau de pré-commercialisation est généralement faible. En revanche, les opérations concernées se situent dans des zones établies. L’horizon de placement constaté oscille entre 2 mois (achat-revente) et 2 à 3 ans (avec travaux).
- Les projets visant l’investissement locatif, qui se matérialisent par l’acquisition, à plusieurs, d’un bien immobilier qui sera ensuite mis en location (voir « Le crowdinvesting, un nouveau défi pour la pierre papier ? »). L’objectif de cet investissement est de toucher une rente régulière d’un bien immobilier précisément choisi, tout en pariant sur l’appréciation du bien au fil de temps. L’horizon de placement est naturellement de plusieurs années (8, 10 , 15 ans… ?)
L’usage des projets immobiliers financés
En ce qui concerne le type d’acteurs qui aura l’usage, in fine, des biens immobiliers financés, quel que soit le type de projet (promotion, rénovation…), ils peuvent s’apprécier en fonction de la destination des bâtiments. On distingue généralement :
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- Les logements résidentiels « libres » ;
- Les logements sociaux ;
- Les bureaux ;
- Les locaux commerciaux ;
- Les locaux logistiques ou locaux d’activité ;
- Les locaux dit « mixtes » (le plus souvent résidentiels libreset logements sociaux) ;
- Et tout autre type de locaux (hôtellerie, résidences gérées senior ou étudiants, établissementsde santé…).
L’analyse du projet, et l’appréciation de son risque afférent, doivent donc être adaptées en fonction des marchés des biens immobiliers sous-jacents (dont les cycles peuvent différer) et de la catégorie des acteurs destinés à les occuper (dont les attentes peuvent elles aussi diverger).
Constats et tendances
Il convient de rappeler que la majorité des plateformes proposent au moins 2 types de projets différents. Mais que le modèle le plus répandu reste celui du financement de projets de promotion immobilière, qui concentrent également l’essentiel des montants collectés. Les projets de rénovation/aménagement, sur de l’immobilier résidentiel, se situent en seconde position. Mais les choses évoluent… Dans le sillage des projets de rénovation/aménagement, certaines plateformes proposent maintenant des projets d’achat-revente et/ou de marchands de biens, avec la possibilité d’inclure des opérations de rénovation et d’aménagement (mais pour des montants faibles au regard de l’ensemble du projet). Le niveau de pré-commercialisation est généralement faible. Une autre tendance semble être le développement des projets de financement des opérations d’immobilier d’entreprise (bureaux, commerce, hébergement). Signalons que l’appréciation du risque commercial de ce type d’opération est plus compliquée. Enfin, certaine(s) plateforme(s), peut-être contrainte(s) par l’étroitesse de leur marché de positionnement, ou leur business model, semble(nt)se diriger vers des projets à maturité plus « faible ». Il peut s’agir, par exemple, de financer l’acquisition d’un terrain avant le lancement de la commercialisation, voire avant l’obtention du permis de construire… Attention donc, une nouvelle fois, car le risque est ici très significatif : y aura-t-il recours des tiers ? Et quid en cas de mauvais positionnement commercial du projet immobilier ?
Grille de lecture du risque
L’analyse des caractéristiques du projet immobilier et la destination des fonds levés (financement corporateou spécifique, nature du projet immobilier financé et usagers des projets financés) permettent donc d’appréhender certains des éléments de la grille de lecture du risque attaché au crowdfunding immobilier. Pourtant d’autres éléments, comme la nature juridique des entités recevant ou utilisant les fonds, et les différents types de supports d’investissement restent encore à étudier ! A suivre dans l’acte III…
Céline Mahinc
[1] Comprendre comment – et dans quoi – vous investissez