Faut-il s’attendre à une baisse de l’immobilier ? Nous avons vu souvent sur pierrepapier.fr que si le marché immobilier devait se retourner, cela ne pourrait provenir que d’un choc externe.
Le Coronavirus est-il ce choc ?
Tout peut encore s’arranger. Mais que devriez-vous faire si l’immobilier entrait dans une crise sérieuse ?
SOMMAIRE : |
Où en sommes-nous ?
Le coronavirus est d’abord un sujet délicat. L’épidémie concerne des personnes qui souffrent, et parfois meurent. Difficile de ne pas penser aux victimes, présentes ou futures.
C’est aussi un sujet complexe, pour trois raisons.
- D’abord, au moment où j’écris ces lignes, qui peut dire où nous en sommes ? On ne peut rien faire d’autre que retenir son souffle en espérant que le virus sera rapidement jugulé. Tout est encore possible. L’arrêt de l’épidémie, comme le pire.
- Ensuite, même à supposer que l’épidémie soit enfin arrêtée, comment évaluer les dégâts déjà causés sur l’économie ? Et si elle s’aggrave, jusqu’où ira-t-elle et comment affectera-t-elle les entreprises de la zone euro ? Puis la consommation ? Puis l’emploi ?
- Enfin, l’effet psychologique ne se contrôle pas. Or la santé du marché immobilier est hautement dépendante de facteurs purement psychologiques.
- Si un nombre suffisant d’acheteurs potentiels se mettent en position d’attente, les vendeurs ne peuvent plus vendre. Le marché se grippe.
- Les acheteurs attendent encore plus. Le nombre de transactions baisse, et les prix aussi. L’inverse est vrai également : si le moral repart, les transactions aussi, et bientôt les prix.
Il n’y a donc aucune visibilité pour l’instant. Je vais donc envisager le pire – ceci ne vaut ni jugement, ni prévision – et examiner quelques principes de la gestion de patrimoine qui ne devraient surtout pas être oubliés dans cette éventualité. Surtout s’il y avait une baisse de. l’immobilier.
Baisse de la Bourse
On dit souvent que la Bourse anticipe. La Bourse est plutôt une girouette, qui indique à tout moment le sens du vent. Mais le vent tourne ! Il ne faut donc pas trop s’attarder sur les variations quotidiennes de la Bourse, ni sur ses humeurs changeantes.
En revanche, ses mouvements violents doivent être pris au sérieux. Il y a quelques semaines, elle ne se souciait pas des premières alertes sur l’épidémie de coronavirus. Au cours des derniers jours, elle a brutalement baissé. Si l’épidémie prenait de grandes proportions, la Bourse continuerait de baisser en anticipation des problèmes qui frapperaient de nombreux aspects de la vie économique. Peut-on alors imaginer que le marché immobilier ne serait pas touché à son tour ? Après coup, il serait facile de dire que, comme d’habitude, la baisse de la Bourse a précédé celle de l’immobilier.
Mais cette histoire n’est pas encore écrite. Imaginons que l’épidémie soit bientôt endiguée, que les échanges normaux retrouvent leur rythme, que la vie reprenne son cours. Alors la Bourse remontera, et il ne se sera rien passé sur l’immobilier.
À ce moment précis, tous les scénarios sont encore possibles. Mais imaginons la pire des évolutions, à savoir une aggravation de l’impact de l’épidémie, donc une baisse de tous les marchés. Que faudrait-il faire ?
Tous les placements connaissent des hausses et des baisses.
Si vous venez d’acheter un appartement et que soudain les prix de l’immobilier commencent à baisser, cela ne veut pas dire que vous avez pris une mauvaise décision. Une baisse conjoncturelle n’est pas une tendance longue. Or le logement en France est tiré, fortement et pour longtemps, par la démographie.
Une baisse n’est dangereuse que si l’on est obligé de vendre. Mais si vous venez d’acheter, vous allez garder votre appartement assez longtemps pour connaître des jours meilleurs, des prix meilleurs. Dans cinq, dix ou quinze ans, que vous importera si en cours de route les prix ont momentanément baissé ?
Il en est de même si vous avez acheté des SCPI d’entreprise – les fameuses SCPI « rendement » – et que l’on entre soudain dans une crise économique. Les revenus vont momentanément souffrir, puis les choses rentreront dans l’ordre. Ce ne serait pas la première fois !
Autrement dit, la logique des placements long terme est que l’on est gagnant si l’on n’est pas obligé de vendre en période économiquement difficile.
Ou, et c’est encore plus important, si l’on n’est pas tenté de vendre à ce moment-là.
L’épargne et le patrimoine se gèrent à long terme
Mais comment ne pas être tenté de prendre de mauvaises décisions au mauvais moment ?
Il existe au karaté un exercice qui fascine toujours le débutant. Le professeur lui demande de mettre son bras en avant, et lui dit qu’il va appuyer dessus pour essayer de le faire baisser. Évidemment, quand le professeur appuie, l’élève peut se crisper autant qu’il le veut, le bras descend sous la poussée. Puis le professeur demande à l’élève de regarder le mur devant lui, par exemple à une dizaine de mètres, et d’imaginer une ligne qui va de son épaule, passe par son bras, et touche un point du mur. Puis le professeur appuie, encore plus fort, et cette fois-ci l’élève arrive à résister et maintient son bras horizontal.
C’est une leçon qui vaut pour la gestion de patrimoine. Il faut savoir regarder loin ! Si l’attention, la réflexion, les décisions ne sont pas englouties dans la conjoncture immédiate mais sont portées vers les dix ou quinze prochaines années, alors on est bien plus efficace.
L’immobilier aussi
Vous êtes en train de rembourser les mensualités d’un appartement mis en location. Et voilà soudain une baisse de l’immobilier . Où est le problème tant que vous avez un locataire, et tant que vous remboursez votre crédit ? Un jour vous aurez fini de payer, et vous aurez amélioré votre patrimoine. C’est là-dessus qu’il convient de maintenir l’attention, en sachant que les marchés baissent, puis remontent. Dans cette mesure la patience est parfois une qualité : si vous souhaitez vendre, il faut parfois attendre un moment plus favorable.
Autre exemple. Vous avez commencé à acheter des parts de SCPI dans un système de versements programmés, à raison d’un virement mensuel. Le marché immobilier baisse. Pourquoi vous interrompre ? Si vous continuez, mois après mois, vous vous constituez du capital. Imaginons que l’année suivante la crise économique batte son plein, et que les parts de votre SCPI baissent elles aussi. Pourquoi vous interrompre ? Après tout, non seulement vous continuez de vous constituer un capital, mais surtout vous achetez des parts moins cher, donc vous en achetez un plus grand nombre. Vous serez gagnant quand tout ira mieux et que les parts progresseront à nouveau.
En gardant l’attention sur l’objectif à long terme, on se branche sur l’essentiel : votre épargne ou votre patrimoine doivent vous accompagner de nombreuses années…le long terme, c’est pour dire que vous allez vivre longtemps !
On peut gagner plus en période de crise
Voilà bien un sujet paradoxal. Tout le monde sait ce qu’il faudrait faire… et pratiquement personne ne le fait !
Commençons par le marché turbulent qu’est la Bourse, nous reviendrons ensuite à une. baisse. éventuelle de l’immobilier.
Vous avez 30 ans, ou 40, ou 50. Vous prendrez votre retraite entre 60… et 70 ans. Quelle est, aujourd’hui, la meilleure Bourse que vous pourriez souhaiter ? Eh bien, une mauvaise Bourse, la plus désespérée possible. Parce que vous êtes en période de constitution d’épargne. Or c’est bien quand la Bourse est basse qu’il faudrait acheter. Pourquoi pratiquement personne ne le fait ?
Baisse du moral
La première raison pour laquelle personne n’achète vraiment quand il le faudrait, est purement psychologique. Le rôle des media, des économistes et des experts en tous genres est de commenter pour nous ce qui est en train de se passer. Ce ne sont pas des conseillers en gestion de patrimoine ! Vous pensez peut-être que je suis dur, mais rappelez-vous : les media ont-ils fait des « couvertures » en 2009 ou en 2010 pour dire que c’était le moment d’acheter des actions ? Vous auriez pourtant gagné beaucoup d’argent…
Il en sera toujours ainsi, parce que si la Bourse baisse, c’est que tout le monde est inquiet. Si tout le monde est inquiet, personne n’est acheteur. Et la boucle est bouclée, on n’achète pas quand il le faudrait.
Il est donc nécessaire d’oublier un instant les violences et frayeurs de l’actualité, et de se souvenir qu’il est dans la nature de la Bourse de baisser, puis de remonter. Et de se souvenir surtout que si l’on est en phase de constitution de patrimoine, les moments de déprime, donc les moments où les actions ne sont pas chères, sont les meilleurs moments pour acheter.
Mais il y a un autre problème.
Incertitude
L’autre raison pour laquelle il est vraiment difficile de profiter des baisses, est plus pratique. Comment s’y prendre ?
On comprend la difficulté. Les actions ont baissé de près de 10 % au cours des trois derniers jours de Bourse. Dois-je acheter ? Mais si la baisse continue, je vais perdre beaucoup… Puis un jour la Bourse a déjà baissé de 40 %, mais les spécialistes et les amis pensent qu’elle va encore baisser car la situation est vraiment devenue grave. Dois-je acheter ? Pas sûr, si la baisse se poursuit…
C’est aussi pour cela, du fait de cette difficulté diabolique, que la plupart des gens achètent… quand la Bourse est plutôt bonne !
Hausses et baisses, l’investisseur qui gagne
Imaginons que vous ayez réussi à vous hisser au-dessus de l’ambiance de catastrophe, et que vous souhaitiez acheter dans cette période. Comment faire ? Il vous parait raisonnable de consacrer, disons, trente mille euros dans cette initiative courageuse. Procédons par étapes.
- La Bourse vient de baisser brutalement de 10 % ? Personne ne peut dire si la situation va s’aggraver, ou si l’épidémie du coronavirus va enfin être jugulée. Eh bien, investissez cinq mille euros en Bourse. Si elle remonte, vous aurez bien joué.
- En fait, la baisse se poursuit, on est maintenant à 25 %. Est-ce le plus bas ? Personne, objectivement, ne peut jamais le dire. Vous investissez de nouveau cinq mille euros.
- Trois mois plus tard, on constate que l’épidémie de coronavirus est enfin jugulée. La baisse de la Bourse a été cette fois-ci aussi importante qu’en 2002, ou qu’en 2008, c’est-à-dire de 50 %. Vous ne vous posez plus de questions, vous investissez à nouveau cinq mille euros.
- Encore trois mois plus tard, on ne parle plus du coronavirus, la page de. l’angoisse est enfin tournée. Mais la Bourse continue à se trainer, elle monte un peu, puis descend tout autant, puis remonte un tout petit peu. Les media n’en parlent plus… Eh bien, vous mettez à nouveau cinq mille euros en actions.
- Quand vous aurez investi les trente mille que vous aviez envisagé, si la Bourse n’a toujours pas repris de belles couleurs, vous oubliez le tout en vous disant que de toute façon vous avez investi dans de bonnes conditions.
Quelques mois, ou quelques années plus tard, vous verrez dans la valeur de votre portefeuille que vous avez fait une excellente opération…mais il fallait oser, et vous l’avez fait.
Voir l’explication concrète sur la période 2007 – 2017, donc au travers de catastrophe de 2008, dans l’article L’art de la performance.
La baisse de l’immobilier en Bourse
Voici un phénomène intéressant. Les. alertes sur le coronavirus se sont intensifiées ces jours-ci. Les prix de l’immobilier n’ont pas encore bougé, évidemment, et pourtant l’immobilier en Bourse a suivi le mouvement des marchés financiers, en baissant de 8 %. Eh oui, quand la Bourse baisse, tout baisse, y compris le compartiment immobilier !
Cela veut dire que vous pouvez pratiquer les achats en baisse boursière, comme nous l’avons vu, en mettant une sécurité dans votre portefeuille : en achetant des SIIC, ou des OPCVM immobiliers.
L’un des intérêts de ce choix est que l’immobilier en Bourse baisse comme le reste mais ses rendements sont alors plus élevés que ceux des autres actions. De plus, avec le temps, même si les actions en général restent moroses, les performances des SIIC finissent par s’aligner sur celles de l’immobilier réel.
La baisse de l’immobilier
Bon, vous avez suivi mon raisonnement sur les achats en baisse, mais ce n’est pas la Bourse qui vous intéresse. Vous préférez rester dans l’immobilier sans passer par le marché financier et ses variations fortes. Il reste donc l’investissement en logement, et les SCPI ou OPCI.
Imaginons, puisque c’est le sujet ici, que l’épidémie de coronavirus se prolonge, et que le marché immobilier se grippe. Moins d’acheteurs. Cela se fera sentir au bout d’un certain temps, sur les prix des logements et sur les valeurs de parts de SCPI (ou OPCI).
Là, on n’est plus en Bourse, les évolutions sont beaucoup plus lentes. On est donc dans un scénario où il y aurait, pour quelques années, une crise sérieuse…horreur ! Mais vous êtes en période de constitution de patrimoine, et vous réfléchissez à long terme.
La dernière grande crise immobilière date des années quatre-vingt-dix. Je connais des personnes qui ont eu l’intelligence ou la chance, et parfois aussi les moyens, d’acheter un appartement en 1996 ou 1998. Je peux vous dire que leur prix d’achat fait rêver aujourd’hui… Quant à ceux ou celles qui ont eu la chance ou le courage d’acheter des parts de SCPI dans ces années où tout le monde désespérait et de l’immobilier et des SCPI, voilà de vrais gagnants.
Donc s’il n’y a pas de crise sérieuse, ce que nous souhaitons tous pour des questions de santé voire de vies sauvées, il y aura eu plus d’inquiétude que de mal. Mais s’il devait y en avoir une, n’oubliez pas de vous rappeler quel type d’investisseur vous êtes. En constitution de patrimoine ? Alors, si vous le pouvez, ne laissez pas passer…
Baisse de la Bourse ? Baisse de l’immobilier ?
Résumons-nous. À ce jour j’ignore totalement quelle sera l’issue de l’épidémie de coronavirus. Je ne peux m’empêcher d’avoir une pensée émue pour les victimes. J’espère que tout rentrera dans l’ordre le plus tôt possible. Mais je n’ai pas de boule de cristal.
Je voulais donc vous alerter, et je vous remercie de m’avoir lu jusqu’ici, sur le fait que ces périodes de drame et d’incertitude sont à haut risque dans la gestion de patrimoine. Ce sont en effet les moments où :
- Quelques-uns, mais quelques-uns seulement, mettent à profit ce type de périodes pour accélérer la constitution de leur patrimoine
- Certains gardent la tête froide, maintiennent leur discipline d’épargne, et s’en réjouiront ensuite quand les marchés remonteront, comme ils le font toujours
- Beaucoup de gens prennent en fait de mauvaises décisions, pénalisantes pour leur patrimoine à long terme, en interrompant ce qu’ils avaient commencé à faire
Si ces quelques lignes permettent à plus de personnes de se situer dans la deuxième catégorie, j’en serai heureux. Et tant mieux pour ceux qui auront le courage de jouer en première catégorie !
Voir aussi
Coronavirus, une crise économique pas du tout comme les autres